Publié le 23 Mars 2021

Après  "La surprise de Châtillon", voici "l'escarmouche d'Autricourt", un passionnant notule de Dominique Masson, sur une guerre totalement oubliée, celle de 1870...

 

Notule d’histoire :

L’ « escarmouche » d’Autricourt, le 29 novembre 1870, et ses conséquences

L’ « escarmouche », c’est le terme qui fut employé par les allemands [i].

Après l’attaque de Ricciotti Garibaldi sur Châtillon, le 19 novembre 1870, le colonel Lettgau, pensant que les garibaldiens allaient revenir en nombre, se retira le lendemain sur Châteauvillain.

Dans sa marche sur la Loire, le général von Kraatz arriva dans cette localité le 21 novembre et ramena le détachement à Châtillon.

Le 18 novembre, quatre compagnies de Landwehr de Soest (1er, 5e et 6e) et  un demi-escadron du 5e hussard de réserve se trouvaient sur les routes de Bologne-Saint Dizier et Bologne-Colombey.

Le 23, ces troupes vinrent rejoindre le général von Kraatz.

La première de ces troupes avait eu une légère rencontre avec une bande de francs-tireurs, près de Plaines (Aube) ; en fait, il semble qu’il y eut deux hommes tués.

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 1 : Décès du 23 novembre 1870 "la guerre franco-allemande de 1870-1871" rédigée par la section historique du Grand Etat-Major prussien en 1882

 Mais la troisième compagnie de Soest eut plus de problèmes.

            Voici ce qu’écrivit l’instituteur Onésime Gallimard, en 1888 [ii] :             

Pendant la guerre de 1870, une compagnie de francs-tireurs du Var, commandée par Verdanet eut connaissance qu'une colonne d'Allemands avait quitté Bar sur Seine et remontait le cours de l'Ource [iii].

Dans la matinée du 29 novembre de ladite année le chef de la troupe fit placer ses hommes dans les vignes des Frasses, près du bois de ce nom dominant la route départementale n° 16 et à 400 mètres du village d'Autricourt.

Lorsque la tête de la colonne ennemie arriva au pont établi sur l'Ource proche des habitations, une vive fusillade s'ouvrit sur eux (au lieu-dit « la folie », petit bois surplombant le petit bois le virage et l’ancien pont sur l’Ource, selon madame Pluyaut [iv]).

Les Allemands ripostèrent et le combat dura une demi-heure.

Pendant l'action les balles sifflaient dru sur le village.

La compagnie franche se retira dans les bois emportant un blessé.

Les Prussiens ramassèrent leurs morts et leurs blessés qui étaient relativement nombreux, 50 à 60 ; ils les placèrent dans des fourgons et rétrogradèrent.                                                                          

Côté garibaldien, c’étaient les  tirailleurs garibaldiens du Var sous les ordres du commandant Danilo, faisant partie de la première brigade, sous le commandement du général Jozef  Bossak-Hauké.

Côté allemand, ils faisaient partie des troupes d’étapes de la IIe armée ; c’était la troisième compagnie du bataillon de Soest du troisième régiment de Lanwher de Westphalie.

En fait, il n’y eut que deux soldats morts et trois blessés.                                                

On ne sait si les deux soldats morts, Anton Schürmann, de Waltringen, et Johann Kleine, d’Essen ont été tués le 23 novembre ou le 29.

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 2 : décès du 29 novembre 1870 "la guerre franco-allemande" opus cité

Puis les ennemis continuèrent leur chemin, mais l’un d’eux devait être trop sérieusement atteint.

En passant à Grancey-sur-Ource, le régiment le laissa  au château et le commandant déclara que, s’il mourait, le village serait brûlé en représailles. Puis le régiment continua sa route et fut de nouveau attaqué à la Grosse Borne.

A la suite de ce combat, le général prussien von Werder qui commandait à Troyes, fit amener à Bar sur Seine M. Simon, maire d'Autricourt, et voulut lui imposer pour la commune une contribution de 50.000 frs.

M. Simon, par sa fermeté parvint à faite abaisser ce chiffre à 10.000 frs, qui furent payés peu de temps après pour éviter une occupation militaire et soustraire les habitants à la brutalité des soldats ennemis.

Quant à Grancey, le soldat blessé, François Hölter, fut accueilli humainement et reçut les soins de la sage-femme du pays, Marie Elisabeth Eicher, mariée dans le village à Nicolas Garnier.

Cette personne était d’origine suisse et parlait allemand, ce qui lui permit de converser avec le blessé.

Tout en s’occupant de son état, elle lui parla de la grande angoisse des habitants qui s’attendaient à l’incendie annoncé, bien qu’ils ne soient pour rien dans les embuscades des Garibaldiens qui se déplaçaient continuellement dans la région.

Le jeune soldat, qui avait trente ans, se sentait faiblir et parla de son épouse et de ses jeunes  enfants restés dans son village de Prusse.

Il était originaire de Uelde, près de Lippstadt ; c’est une ville de l’arrondissement de Soest, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie [v].

Sa fin approchait, mais madame Eicher fut assez éloquente ; il s’émut et décida de faire grâce au village de Grancey.

Il mourut le 2 décembre 1870. 

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 3 : Décès de François Hölter. Etat-Civil de Grancey sur Ource

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

                                                                                              Selon la loi du 4 avril 1873 relative aux tombes des militaires morts pendant cette guerre, aussi bien français qu’allemands, sur la demande du préfet, les terrains où se trouvaient des tombes militaires devaient être cédés à l’Etat au prix du tarif en vigueur pour les concessions perpétuelles ; les terrains et les tombes  concédés à l’Etat  devaient être conservés par la commune en bon état d’entretien.

A Grancey, selon le rapport d’Emile de Marcère, en 1878, une concession de 2 mètres fut accordée, le, 30 juillet 1876 [vi].

D’abord enterrés derrière l’église, les restes de François Hölter furent déplacés dans un carré militaire au cimetière (même si un doute peut persister sur cette tombe) [vii].

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 4 : tombe de François Hölter, cimetière de Grancey sur Ource, Cliché Dominique Masson

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 5 : tombe de François Hölter au cimetière de Grancey sur Ource, cliché Dominique Masson

Les Grancéens virent là une intervention du ciel et de la sainte Vierge, à qui ils avaient dédié leur nouvelle église en 1833.

Ils décidèrent d’élever sur le coteau de Beauregard, au cœur du vignoble, une chapelle d’action de grâce au moyen d’une souscription  et de placer le village à jamais sous la protection de la Vierge. 

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 6 : La chapelle de Beauregard et l'église Notre Dame de l'Assomption de Grancey sur Ource, cliché Dominique Masson

La chapelle fut rehaussée d’une statue de la Vierge, œuvre du sculpteur châtillonnais Lefort.

Elle tient le blé et le raisin, emblèmes des paysans vignerons grancéens.

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 7 : la Vierge dominant la chapelle de Beauregard, cliché Dominique Masson

Elle surmonte une inscription : « A la Vierge Immaculée-Ils m’ont établie gardienne-les habitants de Grancey-1870 ».

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 8 : inscription de remerciement , chapelle de Beauregard, cliché Dominique Masson

Chaque année, le 15 août, date de l’Assomption de la Vierge, une procession se rendait de l’église à la chapelle en chantant les cantiques de Lourdes.

Puis le prêtre faisait un court office et l’on redescendait à l’église où était encore célébré un salut, suivi de la bénédiction des enfants du village.

Cette procession cessa vers les années 1955 environ.

Le curé Roch Delamaison, décédé en 1874, se fit enterrer au chevet de la chapelle.

"L'escarmouche d'Autricourt" le 29 novembre 1870 et ses conséquences, un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 9 : la chapelle de Beauregard à Grancey sur Ource, cliché Dominique Masson

Bâtie sur un terrain privé, la chapelle devint la propriété de madame et monsieur Le Charpentier, qui eurent à cœur de l’entretenir et de la protéger.

Finalement, en 1978, madame Le Charpentier en fit don à la commune.

 (Dominique Masson)

 Remerciements à monsieur Günter Wiesendahl, historien à Hamm, en Allemagne, et à monsieur Michel Massé.

 [i] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien », traduction par E.Costa de Serda ; tome V, 1882

[ii]Gallimard Onésime : « Monographie de la commune d’Autricourt », Cahiers du Châtillonnais, n° 64

[iii] Selon l’ouvrage « la guerre franco-allemande » (op. cit.)…, « une bande se composant de plusieurs centaines d’hommes, réussit à barrer le chemin, près d’Autricourt, à la 3e compagnie de Soest, qui se dirigeait de Bar-sur-Aube vers Châtillon ».

[iv] Goyard-Pluyaut Christiane : « C’est un village de France ; il a nom : Grancey-sur-Ource » ; Cahiers du Châtillonnais, n° 40

[v] Uelde fait aujourd’hui partie de la ville d’Anröchte ; dans le « Westfälischer Anzeiger » du 6 décembre 1870, il est indiqué que le bataillon de Soest avait perdu deux hommes dans une bataille près de Plaines, le 28 novembre. Le militaire Anton Schürmann était porté disparu et le militaire Johann Kleine d’Essen  avait été tué. Renseignements fournis par monsieur Günter Wiesendahl

[vi] « Exécution de la loi du 4 avril 1873, rapport d’Emile de Marcère », 1878. Il est écrit (p. 68 et p. 351) : «  concession de 2 mètres pour un Français », mais aucun français n’a été signalé mort à Grancey.

[vii]« Dossier : 150e anniversaire de la guerre de 1870 », Ministère des Armées ; 2020

 

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 1 Mars 2021

 Dominique Masson continue de nous conter ce qui se passa dans le Châtillonnais  durant la guerre de 1870.

Après la fameuse "surprise de Châtillon", les villages voisins ne furent pas épargnés...

Merci à lui pour ses passionnantes recherches historiques.

Notule d’histoire

Prussiens et francs-tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871

 

Le 14 octobre 1870, Giuseppe Garibaldi installait son état-major à Dôle et organisait l’armée des Vosges en quatre brigades.

Du 4 au 7 novembre, s’organisait la quatrième brigade, sous le commandement de Ricciotti Garibaldi.

Mais, selon l’instituteurd’Ampilly, L. Goutey,[1]le 5 novembre, une trentaine de « garibaldiens » passa à Ampilly, se dirigeant vers Semur ; peut-être était-ce un groupe qui voulait se joindre à Garibaldi (Ricciotti sera à Semur le 17).

 Le 19 novembre, de 6 heures à 10 heures du matin, la quatrième brigade de l’armée des Vosges, commandée par Ricciotti Garibaldi effectuait une « surprise » sur Châtillon.

                                                                          Le général prussien Eugène Antoine Théophile von Podbielski, quartier-maître à l’état-major prussien, dans la 96e dépêche (Berlin, 22 novembre) datée du 21 novembre, de Versailles, relatait le fait :

Les gardes mobiles battus à Dreux et Châteauneuf ont pris la fuite vers l’ouest et le nord-ouest.                                                                        

Le 19, le bataillon de la Landwehr Unna et deux escadrons  du 5e régiment des hussards de réserve ont été attaqués à Châtillon ; ils se sont retirés avec une perte de 120 hommes et de 70 chevaux, sur Châteauvillain.                            

Des autres armées, il n’y a pas de communications marquantes.

A Châtillon, stationnaient les 1re, 2e et 4e compagnies d’Unna (soit 460 hommes) .

Unna est une ville dans le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie), et la 2e compagnie du 5e hussard de réserve (avec 94 chevaux), sous le commandement du colonel Lettgau.

C’étaient des troupes reléguées en deuxième ligne.  

 Les pertes subies par l’armée prussienne furent largement surestimées.

Encore après-guerre, dans le rapport de la section historique du grand état-major prussien, celui-ci comptabilise, pour le bataillon Unna, 2 officiers ou sous-officiers blessés et 5 disparus et, pour les hommes, 12 tués et 8 blessés.

Pour le régiment de hussards, il y avait un officier tué, ainsi qu’un homme et un autre blessé, mais 44 disparus (plus 74 chevaux disparus).

Il faut y ajouter un payeur, Schmidt (Ricciotti s’était emparé de la caisse du régiment), et un médecin aide-major, le docteur Hensgen[2].

 "Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

 

figure 1 :Grenest "l'armée de l'Est-Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. paris 1895

 

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 2 : 96ème dépêche allemande annonçant la "surprise de Châtillon"

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

figure 3 :tableau des pertes subies selon l'armée prussienne "à la guerre franco-allemande" op cité

Selon Garibaldi, il y eut 164 soldats et 13 officiers prisonniers, 72 chevaux et 6 voitures de matériel, notamment celle de la poste (plus deux cantinières « très laides »).

A Tours, on annonça que :

l’ennemi a été surpris à Châtillon (département de la Côte d’Or) par les troupes garibaldiennes sous le commandement de Ricciotti. Tout a été tué ou fait prisonnier : 7 à 800 hommes environ[3].                                                                                             

En fait, il semble qu’il n’y ait eu que 14 soldats tués du côté prussien et 6 pour les garibaldiens.

Après son attaque, Garibaldi et ses hommes repartirent vers Coulmier:        

il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après une telle expédition.

Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi de tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes[4].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 4 : Grenest "l'armée de l'Est-relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Paris 1895

Edmond Thiébaut raconte aussi [5]:

Les prisonniers marchaient au centre de la colonne entre les deux files des compagnies.

La garde des officiers était confiée aux chasseurs des alpes ; l’attitude de ces Allemands était fière et résignée.

Ils semblaient considérer avec étonnement la franche gaîté de nos francs-tireurs.

Parmi les soldats, on remarquait un mélange singulier de toutes les armes.

On y trouvait les costumes de la landwehr, des chasseurs, à pied, de divers régiments d’infanterie de ligne, des hussards, des chasseurs à cheval, des soldats de l’intendance, de l’ambulance, des postes ; des musiciens, des tambours, des fifres et un splendide canne-major.

La plupart d’entre eux étaient tremblants et désolés, protestant dans une langue impossible de leur amitié pour les francs-tireurs, et proférant contre Guillaume et Bismarck les plus dures imprécations …

Sur toute notre route, nous recevions les ovations des habitants des villages que nous traversions…

La cavalerie fermait la marche ; ce n’était pas le côté le moins curieux du cortège.

On avait hissé sur les chevaux les hommes blessés ou fatigués qui ne pouvaient suivre la colonne.

Ces cavaliers de circonstance étaient comme leurs camarades coiffés du paratonnerre ou du colback des hussards ; cet ensemble formait un escadron de l’effet le plus grotesque.

Sur leur route, ils passèrent par Ampilly.

Pendant leur arrêt, un coup de feu frappa dans la région du cœur un franc-tireur suisse, né à Neuchâtel, nommé Louis Perrey.

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figur 5 : Décès de Louis Perrey, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Ce n’est que deux mois plus tard qu’il succombait à ses blessures, le 12 janvier 1871, âgé de 43 ans,au domicile de Marie Collin, sœur institutrice.(depuis 1854, un don avait été fait pour la venue des sœurs congréganistes, mais il n’y eut qu’une institutrice en poste, madame Collin, en religion sœur Juliette).

Selon l’instituteur L. Goutey, le soir du même jour (19 novembre), un autre passage de francs-tireurs eut lieu ; un soldat a été, dit-on, tué par vengeance, par un de ses camarades florentins,  Egiste Cortepassé[6].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 6 : décès d'Egiste Cortepassé, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Agé de 22 ans,né à Florence, il décéda à l’auberge de Basile Cazet.

 Ces tombes n’existent plus au cimetière d’Ampilly, alors qu’elles auraient dû bénéficier de la loi du 4 avril 1873, relative aux tombes de militaires morts pendant cette guerre, et garantissant leur protection.

                                                                                              Les garibaldiens partirent vers Coulmier

  Là, on savait déjà notre succès et notre retour était attendu avec impatience…

Aussitôt notre arrivée au centre du village, les prisonniers furent conduits dans la mairie qui avait été disposée pour les recevoir.

On s’occupa de les ravitailler et on les laissa sous la garde d’un poste solide.

Les officiers, libres sur parole, purent entrer à l’auberge où un repas leur avait été préparé.

Dans la même journée, ils partaient pour Autun, accompagnés seulement de deux officiers choisis pour ce service…

Dès le jour, les prisonniers confiés à la garde nationale de Montbard se mettaient en route.

La garde nationale de Semur devait les venir chercher et les remettre entre les mains du détachement envoyé à cet effet à Saulieu[7].                           

 Selon le Progrès de Lyon, du 26 novembre :                                                    

Avant-hier, 200 ( ?) Prussiens faits prisonniers à Châtillon par les Garibaldiens sont arrivés sous l’escorte de francs-tireurs.

Parmi eux se trouvent neuf officiers qui sont descendus à l’hôtel d’Angleterre et à l’hôtel des Deux-Mondes.

Les soldats ont été internés au fort des Charpennes[8]

(parmi les manquants, la Gazette de Westphalie avait recensé, le premier décembre, les premiers lieutenants de Werthern et Kemper ; le lieutenant Brinkmann ; les vice-feldwebels Mellin et Thiene ; le payeur Schmidt et le docteur Hensgen).                                      

Quelques francs-tireurs avaient été blessés lors de l’attaque sur Châtillon et faits prisonniers.

Le 13 janvier 1871, trois francs-tireurs soignés à l’hôpital à la suite de leurs blessures sont conduits en Allemagne (avec Boucquart, meunier à Vix, accusé d’avoir tiré sur une patrouille allemande, le 30 novembre)[9].

Les prussiens avaient déjà paru à Ampilly le 11 novembre, au nombre de 25.

Après l’attaque sur Châtillon, ils revinrent le 5 décembre ; les Allées furent occupées par des soldats tandis que d’autres faisaient des perquisitions à la recherche d’armes.

Jusqu’au 14, il y eut passage d’éclaireurs ennemis.

Mais il y eut deux grands séjours de l’armée prussienne à Ampilly.

Le premier fut du 14 au 17 décembre 1870.

Parmi les officiers, se trouvait  un jeune homme de 18 ans, le prince Hermann de Schambourg-Lippe.

Le père de ce jeune prince, Adolphe Ier, qui était chef de cohorte et accompagnait le général von Zastrow, stationna à Châtillon, du 14 au 18 décembre.

Profitant de son séjour à Châtillon, il vint dans la soirée du 16 décembre, visiter Ampilly et voir son fils.

Le second eut lieu du 11 au 14 janvier 1871.

Déjà, le 8, arrivèrent pour la nuit, 500 soldats prussiens.

Le 11, ce fut 1200 chasseurs puis, les trois autres jours, 1500 chasseurs et artilleurs.

Car c’est à Châtillon que le général de cavalerie, baron von Manteuffel, réunit la nouvelle armée, dite armée du sud, composée des IIeet VIIe corps d’armée (plus le XIVe corps d’armée, totalisant ensemble 118 bataillons, 54 escadrons et 51 batteries), pour attaquer Dijon défendu par Garibaldi et repousser l’armée de Bourbaki. 

Selon l’instituteur Goutey

Les habitants eurent à se plaindre des chefs et des soldats ; l’on n’avait pas encore vu chefs plus orgueilleux et plus exigeants, domestiques plus impérieux et grossiers, soldats plus dédaigneux.

Le pays a eu à souffrir des exigences, des rapines et des excès de vin de cette armée indisciplinée.  

 Et il ajoute une aventure arrivée au maire d’Ampilly :    

 Le 14 janvier, l’heure du départ sonnée, le commandant s’informe si tous les hommes et les ch evaux requis sont partis pour Châtillon. Les notes prises par la poste, n’en constatant que la moitié, le commandant fait emmener aussitôt, comme prisonnier de guerre, M. Montenot, maire, qui, en sabots, est obligé de suivre l’armée par une neige toute verglacée. Ce n’est qu’à Darbois, commune de Buncey, que M. Montenot a pu se procurer des souliers, l’armée ennemie ayant quitté la route 71, pour prendre une voie rurale passant par Darbois, la Grange-Emery, et gagner la route n° 13. Bientôt M. Montenot voit arriver ses voituriers réquisitionnés, ceux-ci ayant passé par des voies détournées pour se rendre à Châtillon ; il en avertit aussitôt le commandant qui, pour toute réponse, lui présenta un cigare.                                                                              Le lendemain, M. Montenot, arrivé à Maisey, pouvait regagner son domicile, fort heureux d’être débarrassé de ses impérieux compagnons de voyage. Quant aux voituriers, la majeure partie n’a été qu’à Leuglay, deux seulement, MM. Mongin et Gillot, sont allés jusqu’à Champlitte

(le quartier général allemand, parti de Châtillon le 14, s’était établi le soir à Voulaines)

 Dominique Masson  (remerciements à M. Massé)

 

[1]Goutey L. : monographie de la commune d’Ampilly-le-Sec ; cahiers du Châtillonnais, n° 85

 

[2] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien » ; traduction par E. Costa de Serda ; 1882

[3] La Bourgogne pendant la guerre et l’occupation allemande (1870-1871), d’après la gazette de Carlsruhe ; traduction du Dr Louis Marchant ; Dijon, 1875

[4] Garibaldi Ricciotti :« Souvenirs de la campagne de France 1870-71, commandant la 4me brigade de l’Armée des Vosges » ; traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[5] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4me brigade ; récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[6]Goutey L: op. cit.

[7] Thiebault ; op. cit.

[8] Gazette de Carlsruhe, op. cit.

[9] Légey Léon : Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon ; Châtillon-sur-Seine, Leclerc, 1899

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 1 Mars 2021

 Dominique Masson continue de nous conter ce qui se passa dans le Châtillonnais  durant la guerre de 1870.

Après la fameuse "surprise de Châtillon", les villages voisins ne furent pas épargnés...

Merci à lui pour ses passionnantes recherches historiques.

Notule d’histoire

Prussiens et francs-tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871

 

Le 14 octobre 1870, Giuseppe Garibaldi installait son état-major à Dôle et organisait l’armée des Vosges en quatre brigades.

Du 4 au 7 novembre, s’organisait la quatrième brigade, sous le commandement de Ricciotti Garibaldi.

Mais, selon l’instituteurd’Ampilly, L. Goutey,[1]le 5 novembre, une trentaine de « garibaldiens » passa à Ampilly, se dirigeant vers Semur ; peut-être était-ce un groupe qui voulait se joindre à Garibaldi (Ricciotti sera à Semur le 17).

 Le 19 novembre, de 6 heures à 10 heures du matin, la quatrième brigade de l’armée des Vosges, commandée par Ricciotti Garibaldi effectuait une « surprise » sur Châtillon.

                                                                          Le général prussien Eugène Antoine Théophile von Podbielski, quartier-maître à l’état-major prussien, dans la 96e dépêche (Berlin, 22 novembre) datée du 21 novembre, de Versailles, relatait le fait :

Les gardes mobiles battus à Dreux et Châteauneuf ont pris la fuite vers l’ouest et le nord-ouest.                                                                        

Le 19, le bataillon de la Landwehr Unna et deux escadrons  du 5e régiment des hussards de réserve ont été attaqués à Châtillon ; ils se sont retirés avec une perte de 120 hommes et de 70 chevaux, sur Châteauvillain.                            

Des autres armées, il n’y a pas de communications marquantes.

A Châtillon, stationnaient les 1re, 2e et 4e compagnies d’Unna (soit 460 hommes) .

Unna est une ville dans le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie), et la 2e compagnie du 5e hussard de réserve (avec 94 chevaux), sous le commandement du colonel Lettgau.

C’étaient des troupes reléguées en deuxième ligne.  

 Les pertes subies par l’armée prussienne furent largement surestimées.

Encore après-guerre, dans le rapport de la section historique du grand état-major prussien, celui-ci comptabilise, pour le bataillon Unna, 2 officiers ou sous-officiers blessés et 5 disparus et, pour les hommes, 12 tués et 8 blessés.

Pour le régiment de hussards, il y avait un officier tué, ainsi qu’un homme et un autre blessé, mais 44 disparus (plus 74 chevaux disparus).

Il faut y ajouter un payeur, Schmidt (Ricciotti s’était emparé de la caisse du régiment), et un médecin aide-major, le docteur Hensgen[2].

 "Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

 

figure 1 :Grenest "l'armée de l'Est-Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. paris 1895

 

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 2 : 96ème dépêche allemande annonçant la "surprise de Châtillon"

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

figure 3 :tableau des pertes subies selon l'armée prussienne "à la guerre franco-allemande" op cité

Selon Garibaldi, il y eut 164 soldats et 13 officiers prisonniers, 72 chevaux et 6 voitures de matériel, notamment celle de la poste (plus deux cantinières « très laides »).

A Tours, on annonça que :

l’ennemi a été surpris à Châtillon (département de la Côte d’Or) par les troupes garibaldiennes sous le commandement de Ricciotti. Tout a été tué ou fait prisonnier : 7 à 800 hommes environ[3].                                                                                             

En fait, il semble qu’il n’y ait eu que 14 soldats tués du côté prussien et 6 pour les garibaldiens.

Après son attaque, Garibaldi et ses hommes repartirent vers Coulmier:        

il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après une telle expédition.

Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi de tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes[4].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 4 : Grenest "l'armée de l'Est-relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Paris 1895

Edmond Thiébaut raconte aussi [5]:

Les prisonniers marchaient au centre de la colonne entre les deux files des compagnies.

La garde des officiers était confiée aux chasseurs des alpes ; l’attitude de ces Allemands était fière et résignée.

Ils semblaient considérer avec étonnement la franche gaîté de nos francs-tireurs.

Parmi les soldats, on remarquait un mélange singulier de toutes les armes.

On y trouvait les costumes de la landwehr, des chasseurs, à pied, de divers régiments d’infanterie de ligne, des hussards, des chasseurs à cheval, des soldats de l’intendance, de l’ambulance, des postes ; des musiciens, des tambours, des fifres et un splendide canne-major.

La plupart d’entre eux étaient tremblants et désolés, protestant dans une langue impossible de leur amitié pour les francs-tireurs, et proférant contre Guillaume et Bismarck les plus dures imprécations …

Sur toute notre route, nous recevions les ovations des habitants des villages que nous traversions…

La cavalerie fermait la marche ; ce n’était pas le côté le moins curieux du cortège.

On avait hissé sur les chevaux les hommes blessés ou fatigués qui ne pouvaient suivre la colonne.

Ces cavaliers de circonstance étaient comme leurs camarades coiffés du paratonnerre ou du colback des hussards ; cet ensemble formait un escadron de l’effet le plus grotesque.

Sur leur route, ils passèrent par Ampilly.

Pendant leur arrêt, un coup de feu frappa dans la région du cœur un franc-tireur suisse, né à Neuchâtel, nommé Louis Perrey.

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figur 5 : Décès de Louis Perrey, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Ce n’est que deux mois plus tard qu’il succombait à ses blessures, le 12 janvier 1871, âgé de 43 ans,au domicile de Marie Collin, sœur institutrice.(depuis 1854, un don avait été fait pour la venue des sœurs congréganistes, mais il n’y eut qu’une institutrice en poste, madame Collin, en religion sœur Juliette).

Selon l’instituteur L. Goutey, le soir du même jour (19 novembre), un autre passage de francs-tireurs eut lieu ; un soldat a été, dit-on, tué par vengeance, par un de ses camarades florentins,  Egiste Cortepassé[6].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 6 : décès d'Egiste Cortepassé, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Agé de 22 ans,né à Florence, il décéda à l’auberge de Basile Cazet.

 Ces tombes n’existent plus au cimetière d’Ampilly, alors qu’elles auraient dû bénéficier de la loi du 4 avril 1873, relative aux tombes de militaires morts pendant cette guerre, et garantissant leur protection.

                                                                                              Les garibaldiens partirent vers Coulmier

  Là, on savait déjà notre succès et notre retour était attendu avec impatience…

Aussitôt notre arrivée au centre du village, les prisonniers furent conduits dans la mairie qui avait été disposée pour les recevoir.

On s’occupa de les ravitailler et on les laissa sous la garde d’un poste solide.

Les officiers, libres sur parole, purent entrer à l’auberge où un repas leur avait été préparé.

Dans la même journée, ils partaient pour Autun, accompagnés seulement de deux officiers choisis pour ce service…

Dès le jour, les prisonniers confiés à la garde nationale de Montbard se mettaient en route.

La garde nationale de Semur devait les venir chercher et les remettre entre les mains du détachement envoyé à cet effet à Saulieu[7].                           

 Selon le Progrès de Lyon, du 26 novembre :                                                    

Avant-hier, 200 ( ?) Prussiens faits prisonniers à Châtillon par les Garibaldiens sont arrivés sous l’escorte de francs-tireurs.

Parmi eux se trouvent neuf officiers qui sont descendus à l’hôtel d’Angleterre et à l’hôtel des Deux-Mondes.

Les soldats ont été internés au fort des Charpennes[8]

(parmi les manquants, la Gazette de Westphalie avait recensé, le premier décembre, les premiers lieutenants de Werthern et Kemper ; le lieutenant Brinkmann ; les vice-feldwebels Mellin et Thiene ; le payeur Schmidt et le docteur Hensgen).                                      

Quelques francs-tireurs avaient été blessés lors de l’attaque sur Châtillon et faits prisonniers.

Le 13 janvier 1871, trois francs-tireurs soignés à l’hôpital à la suite de leurs blessures sont conduits en Allemagne (avec Boucquart, meunier à Vix, accusé d’avoir tiré sur une patrouille allemande, le 30 novembre)[9].

Les prussiens avaient déjà paru à Ampilly le 11 novembre, au nombre de 25.

Après l’attaque sur Châtillon, ils revinrent le 5 décembre ; les Allées furent occupées par des soldats tandis que d’autres faisaient des perquisitions à la recherche d’armes.

Jusqu’au 14, il y eut passage d’éclaireurs ennemis.

Mais il y eut deux grands séjours de l’armée prussienne à Ampilly.

Le premier fut du 14 au 17 décembre 1870.

Parmi les officiers, se trouvait  un jeune homme de 18 ans, le prince Hermann de Schambourg-Lippe.

Le père de ce jeune prince, Adolphe Ier, qui était chef de cohorte et accompagnait le général von Zastrow, stationna à Châtillon, du 14 au 18 décembre.

Profitant de son séjour à Châtillon, il vint dans la soirée du 16 décembre, visiter Ampilly et voir son fils.

Le second eut lieu du 11 au 14 janvier 1871.

Déjà, le 8, arrivèrent pour la nuit, 500 soldats prussiens.

Le 11, ce fut 1200 chasseurs puis, les trois autres jours, 1500 chasseurs et artilleurs.

Car c’est à Châtillon que le général de cavalerie, baron von Manteuffel, réunit la nouvelle armée, dite armée du sud, composée des IIeet VIIe corps d’armée (plus le XIVe corps d’armée, totalisant ensemble 118 bataillons, 54 escadrons et 51 batteries), pour attaquer Dijon défendu par Garibaldi et repousser l’armée de Bourbaki. 

Selon l’instituteur Goutey

Les habitants eurent à se plaindre des chefs et des soldats ; l’on n’avait pas encore vu chefs plus orgueilleux et plus exigeants, domestiques plus impérieux et grossiers, soldats plus dédaigneux.

Le pays a eu à souffrir des exigences, des rapines et des excès de vin de cette armée indisciplinée.  

 Et il ajoute une aventure arrivée au maire d’Ampilly :    

 Le 14 janvier, l’heure du départ sonnée, le commandant s’informe si tous les hommes et les ch evaux requis sont partis pour Châtillon. Les notes prises par la poste, n’en constatant que la moitié, le commandant fait emmener aussitôt, comme prisonnier de guerre, M. Montenot, maire, qui, en sabots, est obligé de suivre l’armée par une neige toute verglacée. Ce n’est qu’à Darbois, commune de Buncey, que M. Montenot a pu se procurer des souliers, l’armée ennemie ayant quitté la route 71, pour prendre une voie rurale passant par Darbois, la Grange-Emery, et gagner la route n° 13. Bientôt M. Montenot voit arriver ses voituriers réquisitionnés, ceux-ci ayant passé par des voies détournées pour se rendre à Châtillon ; il en avertit aussitôt le commandant qui, pour toute réponse, lui présenta un cigare.                                                                              Le lendemain, M. Montenot, arrivé à Maisey, pouvait regagner son domicile, fort heureux d’être débarrassé de ses impérieux compagnons de voyage. Quant aux voituriers, la majeure partie n’a été qu’à Leuglay, deux seulement, MM. Mongin et Gillot, sont allés jusqu’à Champlitte

(le quartier général allemand, parti de Châtillon le 14, s’était établi le soir à Voulaines)

 Dominique Masson  (remerciements à M. Massé)

 

[1]Goutey L. : monographie de la commune d’Ampilly-le-Sec ; cahiers du Châtillonnais, n° 85

 

[2] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien » ; traduction par E. Costa de Serda ; 1882

[3] La Bourgogne pendant la guerre et l’occupation allemande (1870-1871), d’après la gazette de Carlsruhe ; traduction du Dr Louis Marchant ; Dijon, 1875

[4] Garibaldi Ricciotti :« Souvenirs de la campagne de France 1870-71, commandant la 4me brigade de l’Armée des Vosges » ; traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[5] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4me brigade ; récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[6]Goutey L: op. cit.

[7] Thiebault ; op. cit.

[8] Gazette de Carlsruhe, op. cit.

[9] Légey Léon : Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon ; Châtillon-sur-Seine, Leclerc, 1899

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 1 Mars 2021

 Dominique Masson continue de nous conter ce qui se passa dans le Châtillonnais  durant la guerre de 1870.

Après la fameuse "surprise de Châtillon", les villages voisins ne furent pas épargnés...

Merci à lui pour ses passionnantes recherches historiques.

Notule d’histoire

Prussiens et francs-tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871

 

Le 14 octobre 1870, Giuseppe Garibaldi installait son état-major à Dôle et organisait l’armée des Vosges en quatre brigades.

Du 4 au 7 novembre, s’organisait la quatrième brigade, sous le commandement de Ricciotti Garibaldi.

Mais, selon l’instituteurd’Ampilly, L. Goutey,[1]le 5 novembre, une trentaine de « garibaldiens » passa à Ampilly, se dirigeant vers Semur ; peut-être était-ce un groupe qui voulait se joindre à Garibaldi (Ricciotti sera à Semur le 17).

 Le 19 novembre, de 6 heures à 10 heures du matin, la quatrième brigade de l’armée des Vosges, commandée par Ricciotti Garibaldi effectuait une « surprise » sur Châtillon.

                                                                          Le général prussien Eugène Antoine Théophile von Podbielski, quartier-maître à l’état-major prussien, dans la 96e dépêche (Berlin, 22 novembre) datée du 21 novembre, de Versailles, relatait le fait :

Les gardes mobiles battus à Dreux et Châteauneuf ont pris la fuite vers l’ouest et le nord-ouest.                                                                        

Le 19, le bataillon de la Landwehr Unna et deux escadrons  du 5e régiment des hussards de réserve ont été attaqués à Châtillon ; ils se sont retirés avec une perte de 120 hommes et de 70 chevaux, sur Châteauvillain.                            

Des autres armées, il n’y a pas de communications marquantes.

A Châtillon, stationnaient les 1re, 2e et 4e compagnies d’Unna (soit 460 hommes) .

Unna est une ville dans le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie), et la 2e compagnie du 5e hussard de réserve (avec 94 chevaux), sous le commandement du colonel Lettgau.

C’étaient des troupes reléguées en deuxième ligne.  

 Les pertes subies par l’armée prussienne furent largement surestimées.

Encore après-guerre, dans le rapport de la section historique du grand état-major prussien, celui-ci comptabilise, pour le bataillon Unna, 2 officiers ou sous-officiers blessés et 5 disparus et, pour les hommes, 12 tués et 8 blessés.

Pour le régiment de hussards, il y avait un officier tué, ainsi qu’un homme et un autre blessé, mais 44 disparus (plus 74 chevaux disparus).

Il faut y ajouter un payeur, Schmidt (Ricciotti s’était emparé de la caisse du régiment), et un médecin aide-major, le docteur Hensgen[2].

 "Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

 

figure 1 :Grenest "l'armée de l'Est-Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. paris 1895

 

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 2 : 96ème dépêche allemande annonçant la "surprise de Châtillon"

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

figure 3 :tableau des pertes subies selon l'armée prussienne "à la guerre franco-allemande" op cité

Selon Garibaldi, il y eut 164 soldats et 13 officiers prisonniers, 72 chevaux et 6 voitures de matériel, notamment celle de la poste (plus deux cantinières « très laides »).

A Tours, on annonça que :

l’ennemi a été surpris à Châtillon (département de la Côte d’Or) par les troupes garibaldiennes sous le commandement de Ricciotti. Tout a été tué ou fait prisonnier : 7 à 800 hommes environ[3].                                                                                             

En fait, il semble qu’il n’y ait eu que 14 soldats tués du côté prussien et 6 pour les garibaldiens.

Après son attaque, Garibaldi et ses hommes repartirent vers Coulmier:        

il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après une telle expédition.

Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi de tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes[4].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 4 : Grenest "l'armée de l'Est-relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Paris 1895

Edmond Thiébaut raconte aussi [5]:

Les prisonniers marchaient au centre de la colonne entre les deux files des compagnies.

La garde des officiers était confiée aux chasseurs des alpes ; l’attitude de ces Allemands était fière et résignée.

Ils semblaient considérer avec étonnement la franche gaîté de nos francs-tireurs.

Parmi les soldats, on remarquait un mélange singulier de toutes les armes.

On y trouvait les costumes de la landwehr, des chasseurs, à pied, de divers régiments d’infanterie de ligne, des hussards, des chasseurs à cheval, des soldats de l’intendance, de l’ambulance, des postes ; des musiciens, des tambours, des fifres et un splendide canne-major.

La plupart d’entre eux étaient tremblants et désolés, protestant dans une langue impossible de leur amitié pour les francs-tireurs, et proférant contre Guillaume et Bismarck les plus dures imprécations …

Sur toute notre route, nous recevions les ovations des habitants des villages que nous traversions…

La cavalerie fermait la marche ; ce n’était pas le côté le moins curieux du cortège.

On avait hissé sur les chevaux les hommes blessés ou fatigués qui ne pouvaient suivre la colonne.

Ces cavaliers de circonstance étaient comme leurs camarades coiffés du paratonnerre ou du colback des hussards ; cet ensemble formait un escadron de l’effet le plus grotesque.

Sur leur route, ils passèrent par Ampilly.

Pendant leur arrêt, un coup de feu frappa dans la région du cœur un franc-tireur suisse, né à Neuchâtel, nommé Louis Perrey.

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figur 5 : Décès de Louis Perrey, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Ce n’est que deux mois plus tard qu’il succombait à ses blessures, le 12 janvier 1871, âgé de 43 ans,au domicile de Marie Collin, sœur institutrice.(depuis 1854, un don avait été fait pour la venue des sœurs congréganistes, mais il n’y eut qu’une institutrice en poste, madame Collin, en religion sœur Juliette).

Selon l’instituteur L. Goutey, le soir du même jour (19 novembre), un autre passage de francs-tireurs eut lieu ; un soldat a été, dit-on, tué par vengeance, par un de ses camarades florentins,  Egiste Cortepassé[6].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 6 : décès d'Egiste Cortepassé, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Agé de 22 ans,né à Florence, il décéda à l’auberge de Basile Cazet.

 Ces tombes n’existent plus au cimetière d’Ampilly, alors qu’elles auraient dû bénéficier de la loi du 4 avril 1873, relative aux tombes de militaires morts pendant cette guerre, et garantissant leur protection.

                                                                                              Les garibaldiens partirent vers Coulmier

  Là, on savait déjà notre succès et notre retour était attendu avec impatience…

Aussitôt notre arrivée au centre du village, les prisonniers furent conduits dans la mairie qui avait été disposée pour les recevoir.

On s’occupa de les ravitailler et on les laissa sous la garde d’un poste solide.

Les officiers, libres sur parole, purent entrer à l’auberge où un repas leur avait été préparé.

Dans la même journée, ils partaient pour Autun, accompagnés seulement de deux officiers choisis pour ce service…

Dès le jour, les prisonniers confiés à la garde nationale de Montbard se mettaient en route.

La garde nationale de Semur devait les venir chercher et les remettre entre les mains du détachement envoyé à cet effet à Saulieu[7].                           

 Selon le Progrès de Lyon, du 26 novembre :                                                    

Avant-hier, 200 ( ?) Prussiens faits prisonniers à Châtillon par les Garibaldiens sont arrivés sous l’escorte de francs-tireurs.

Parmi eux se trouvent neuf officiers qui sont descendus à l’hôtel d’Angleterre et à l’hôtel des Deux-Mondes.

Les soldats ont été internés au fort des Charpennes[8]

(parmi les manquants, la Gazette de Westphalie avait recensé, le premier décembre, les premiers lieutenants de Werthern et Kemper ; le lieutenant Brinkmann ; les vice-feldwebels Mellin et Thiene ; le payeur Schmidt et le docteur Hensgen).                                      

Quelques francs-tireurs avaient été blessés lors de l’attaque sur Châtillon et faits prisonniers.

Le 13 janvier 1871, trois francs-tireurs soignés à l’hôpital à la suite de leurs blessures sont conduits en Allemagne (avec Boucquart, meunier à Vix, accusé d’avoir tiré sur une patrouille allemande, le 30 novembre)[9].

Les prussiens avaient déjà paru à Ampilly le 11 novembre, au nombre de 25.

Après l’attaque sur Châtillon, ils revinrent le 5 décembre ; les Allées furent occupées par des soldats tandis que d’autres faisaient des perquisitions à la recherche d’armes.

Jusqu’au 14, il y eut passage d’éclaireurs ennemis.

Mais il y eut deux grands séjours de l’armée prussienne à Ampilly.

Le premier fut du 14 au 17 décembre 1870.

Parmi les officiers, se trouvait  un jeune homme de 18 ans, le prince Hermann de Schambourg-Lippe.

Le père de ce jeune prince, Adolphe Ier, qui était chef de cohorte et accompagnait le général von Zastrow, stationna à Châtillon, du 14 au 18 décembre.

Profitant de son séjour à Châtillon, il vint dans la soirée du 16 décembre, visiter Ampilly et voir son fils.

Le second eut lieu du 11 au 14 janvier 1871.

Déjà, le 8, arrivèrent pour la nuit, 500 soldats prussiens.

Le 11, ce fut 1200 chasseurs puis, les trois autres jours, 1500 chasseurs et artilleurs.

Car c’est à Châtillon que le général de cavalerie, baron von Manteuffel, réunit la nouvelle armée, dite armée du sud, composée des IIeet VIIe corps d’armée (plus le XIVe corps d’armée, totalisant ensemble 118 bataillons, 54 escadrons et 51 batteries), pour attaquer Dijon défendu par Garibaldi et repousser l’armée de Bourbaki. 

Selon l’instituteur Goutey

Les habitants eurent à se plaindre des chefs et des soldats ; l’on n’avait pas encore vu chefs plus orgueilleux et plus exigeants, domestiques plus impérieux et grossiers, soldats plus dédaigneux.

Le pays a eu à souffrir des exigences, des rapines et des excès de vin de cette armée indisciplinée.  

 Et il ajoute une aventure arrivée au maire d’Ampilly :    

 Le 14 janvier, l’heure du départ sonnée, le commandant s’informe si tous les hommes et les ch evaux requis sont partis pour Châtillon. Les notes prises par la poste, n’en constatant que la moitié, le commandant fait emmener aussitôt, comme prisonnier de guerre, M. Montenot, maire, qui, en sabots, est obligé de suivre l’armée par une neige toute verglacée. Ce n’est qu’à Darbois, commune de Buncey, que M. Montenot a pu se procurer des souliers, l’armée ennemie ayant quitté la route 71, pour prendre une voie rurale passant par Darbois, la Grange-Emery, et gagner la route n° 13. Bientôt M. Montenot voit arriver ses voituriers réquisitionnés, ceux-ci ayant passé par des voies détournées pour se rendre à Châtillon ; il en avertit aussitôt le commandant qui, pour toute réponse, lui présenta un cigare.                                                                              Le lendemain, M. Montenot, arrivé à Maisey, pouvait regagner son domicile, fort heureux d’être débarrassé de ses impérieux compagnons de voyage. Quant aux voituriers, la majeure partie n’a été qu’à Leuglay, deux seulement, MM. Mongin et Gillot, sont allés jusqu’à Champlitte

(le quartier général allemand, parti de Châtillon le 14, s’était établi le soir à Voulaines)

 Dominique Masson  (remerciements à M. Massé)

 

[1]Goutey L. : monographie de la commune d’Ampilly-le-Sec ; cahiers du Châtillonnais, n° 85

 

[2] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien » ; traduction par E. Costa de Serda ; 1882

[3] La Bourgogne pendant la guerre et l’occupation allemande (1870-1871), d’après la gazette de Carlsruhe ; traduction du Dr Louis Marchant ; Dijon, 1875

[4] Garibaldi Ricciotti :« Souvenirs de la campagne de France 1870-71, commandant la 4me brigade de l’Armée des Vosges » ; traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[5] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4me brigade ; récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[6]Goutey L: op. cit.

[7] Thiebault ; op. cit.

[8] Gazette de Carlsruhe, op. cit.

[9] Légey Léon : Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon ; Châtillon-sur-Seine, Leclerc, 1899

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 1 Mars 2021

 Dominique Masson continue de nous conter ce qui se passa dans le Châtillonnais  durant la guerre de 1870.

Après la fameuse "surprise de Châtillon", les villages voisins ne furent pas épargnés...

Merci à lui pour ses passionnantes recherches historiques.

Notule d’histoire

Prussiens et francs-tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871

 

Le 14 octobre 1870, Giuseppe Garibaldi installait son état-major à Dôle et organisait l’armée des Vosges en quatre brigades.

Du 4 au 7 novembre, s’organisait la quatrième brigade, sous le commandement de Ricciotti Garibaldi.

Mais, selon l’instituteurd’Ampilly, L. Goutey,[1]le 5 novembre, une trentaine de « garibaldiens » passa à Ampilly, se dirigeant vers Semur ; peut-être était-ce un groupe qui voulait se joindre à Garibaldi (Ricciotti sera à Semur le 17).

 Le 19 novembre, de 6 heures à 10 heures du matin, la quatrième brigade de l’armée des Vosges, commandée par Ricciotti Garibaldi effectuait une « surprise » sur Châtillon.

                                                                          Le général prussien Eugène Antoine Théophile von Podbielski, quartier-maître à l’état-major prussien, dans la 96e dépêche (Berlin, 22 novembre) datée du 21 novembre, de Versailles, relatait le fait :

Les gardes mobiles battus à Dreux et Châteauneuf ont pris la fuite vers l’ouest et le nord-ouest.                                                                        

Le 19, le bataillon de la Landwehr Unna et deux escadrons  du 5e régiment des hussards de réserve ont été attaqués à Châtillon ; ils se sont retirés avec une perte de 120 hommes et de 70 chevaux, sur Châteauvillain.                            

Des autres armées, il n’y a pas de communications marquantes.

A Châtillon, stationnaient les 1re, 2e et 4e compagnies d’Unna (soit 460 hommes) .

Unna est une ville dans le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie), et la 2e compagnie du 5e hussard de réserve (avec 94 chevaux), sous le commandement du colonel Lettgau.

C’étaient des troupes reléguées en deuxième ligne.  

 Les pertes subies par l’armée prussienne furent largement surestimées.

Encore après-guerre, dans le rapport de la section historique du grand état-major prussien, celui-ci comptabilise, pour le bataillon Unna, 2 officiers ou sous-officiers blessés et 5 disparus et, pour les hommes, 12 tués et 8 blessés.

Pour le régiment de hussards, il y avait un officier tué, ainsi qu’un homme et un autre blessé, mais 44 disparus (plus 74 chevaux disparus).

Il faut y ajouter un payeur, Schmidt (Ricciotti s’était emparé de la caisse du régiment), et un médecin aide-major, le docteur Hensgen[2].

 "Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

 

figure 1 :Grenest "l'armée de l'Est-Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. paris 1895

 

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 2 : 96ème dépêche allemande annonçant la "surprise de Châtillon"

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

figure 3 :tableau des pertes subies selon l'armée prussienne "à la guerre franco-allemande" op cité

Selon Garibaldi, il y eut 164 soldats et 13 officiers prisonniers, 72 chevaux et 6 voitures de matériel, notamment celle de la poste (plus deux cantinières « très laides »).

A Tours, on annonça que :

l’ennemi a été surpris à Châtillon (département de la Côte d’Or) par les troupes garibaldiennes sous le commandement de Ricciotti. Tout a été tué ou fait prisonnier : 7 à 800 hommes environ[3].                                                                                             

En fait, il semble qu’il n’y ait eu que 14 soldats tués du côté prussien et 6 pour les garibaldiens.

Après son attaque, Garibaldi et ses hommes repartirent vers Coulmier:        

il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après une telle expédition.

Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi de tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes[4].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 4 : Grenest "l'armée de l'Est-relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Paris 1895

Edmond Thiébaut raconte aussi [5]:

Les prisonniers marchaient au centre de la colonne entre les deux files des compagnies.

La garde des officiers était confiée aux chasseurs des alpes ; l’attitude de ces Allemands était fière et résignée.

Ils semblaient considérer avec étonnement la franche gaîté de nos francs-tireurs.

Parmi les soldats, on remarquait un mélange singulier de toutes les armes.

On y trouvait les costumes de la landwehr, des chasseurs, à pied, de divers régiments d’infanterie de ligne, des hussards, des chasseurs à cheval, des soldats de l’intendance, de l’ambulance, des postes ; des musiciens, des tambours, des fifres et un splendide canne-major.

La plupart d’entre eux étaient tremblants et désolés, protestant dans une langue impossible de leur amitié pour les francs-tireurs, et proférant contre Guillaume et Bismarck les plus dures imprécations …

Sur toute notre route, nous recevions les ovations des habitants des villages que nous traversions…

La cavalerie fermait la marche ; ce n’était pas le côté le moins curieux du cortège.

On avait hissé sur les chevaux les hommes blessés ou fatigués qui ne pouvaient suivre la colonne.

Ces cavaliers de circonstance étaient comme leurs camarades coiffés du paratonnerre ou du colback des hussards ; cet ensemble formait un escadron de l’effet le plus grotesque.

Sur leur route, ils passèrent par Ampilly.

Pendant leur arrêt, un coup de feu frappa dans la région du cœur un franc-tireur suisse, né à Neuchâtel, nommé Louis Perrey.

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figur 5 : Décès de Louis Perrey, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Ce n’est que deux mois plus tard qu’il succombait à ses blessures, le 12 janvier 1871, âgé de 43 ans,au domicile de Marie Collin, sœur institutrice.(depuis 1854, un don avait été fait pour la venue des sœurs congréganistes, mais il n’y eut qu’une institutrice en poste, madame Collin, en religion sœur Juliette).

Selon l’instituteur L. Goutey, le soir du même jour (19 novembre), un autre passage de francs-tireurs eut lieu ; un soldat a été, dit-on, tué par vengeance, par un de ses camarades florentins,  Egiste Cortepassé[6].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 6 : décès d'Egiste Cortepassé, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Agé de 22 ans,né à Florence, il décéda à l’auberge de Basile Cazet.

 Ces tombes n’existent plus au cimetière d’Ampilly, alors qu’elles auraient dû bénéficier de la loi du 4 avril 1873, relative aux tombes de militaires morts pendant cette guerre, et garantissant leur protection.

                                                                                              Les garibaldiens partirent vers Coulmier

  Là, on savait déjà notre succès et notre retour était attendu avec impatience…

Aussitôt notre arrivée au centre du village, les prisonniers furent conduits dans la mairie qui avait été disposée pour les recevoir.

On s’occupa de les ravitailler et on les laissa sous la garde d’un poste solide.

Les officiers, libres sur parole, purent entrer à l’auberge où un repas leur avait été préparé.

Dans la même journée, ils partaient pour Autun, accompagnés seulement de deux officiers choisis pour ce service…

Dès le jour, les prisonniers confiés à la garde nationale de Montbard se mettaient en route.

La garde nationale de Semur devait les venir chercher et les remettre entre les mains du détachement envoyé à cet effet à Saulieu[7].                           

 Selon le Progrès de Lyon, du 26 novembre :                                                    

Avant-hier, 200 ( ?) Prussiens faits prisonniers à Châtillon par les Garibaldiens sont arrivés sous l’escorte de francs-tireurs.

Parmi eux se trouvent neuf officiers qui sont descendus à l’hôtel d’Angleterre et à l’hôtel des Deux-Mondes.

Les soldats ont été internés au fort des Charpennes[8]

(parmi les manquants, la Gazette de Westphalie avait recensé, le premier décembre, les premiers lieutenants de Werthern et Kemper ; le lieutenant Brinkmann ; les vice-feldwebels Mellin et Thiene ; le payeur Schmidt et le docteur Hensgen).                                      

Quelques francs-tireurs avaient été blessés lors de l’attaque sur Châtillon et faits prisonniers.

Le 13 janvier 1871, trois francs-tireurs soignés à l’hôpital à la suite de leurs blessures sont conduits en Allemagne (avec Boucquart, meunier à Vix, accusé d’avoir tiré sur une patrouille allemande, le 30 novembre)[9].

Les prussiens avaient déjà paru à Ampilly le 11 novembre, au nombre de 25.

Après l’attaque sur Châtillon, ils revinrent le 5 décembre ; les Allées furent occupées par des soldats tandis que d’autres faisaient des perquisitions à la recherche d’armes.

Jusqu’au 14, il y eut passage d’éclaireurs ennemis.

Mais il y eut deux grands séjours de l’armée prussienne à Ampilly.

Le premier fut du 14 au 17 décembre 1870.

Parmi les officiers, se trouvait  un jeune homme de 18 ans, le prince Hermann de Schambourg-Lippe.

Le père de ce jeune prince, Adolphe Ier, qui était chef de cohorte et accompagnait le général von Zastrow, stationna à Châtillon, du 14 au 18 décembre.

Profitant de son séjour à Châtillon, il vint dans la soirée du 16 décembre, visiter Ampilly et voir son fils.

Le second eut lieu du 11 au 14 janvier 1871.

Déjà, le 8, arrivèrent pour la nuit, 500 soldats prussiens.

Le 11, ce fut 1200 chasseurs puis, les trois autres jours, 1500 chasseurs et artilleurs.

Car c’est à Châtillon que le général de cavalerie, baron von Manteuffel, réunit la nouvelle armée, dite armée du sud, composée des IIeet VIIe corps d’armée (plus le XIVe corps d’armée, totalisant ensemble 118 bataillons, 54 escadrons et 51 batteries), pour attaquer Dijon défendu par Garibaldi et repousser l’armée de Bourbaki. 

Selon l’instituteur Goutey

Les habitants eurent à se plaindre des chefs et des soldats ; l’on n’avait pas encore vu chefs plus orgueilleux et plus exigeants, domestiques plus impérieux et grossiers, soldats plus dédaigneux.

Le pays a eu à souffrir des exigences, des rapines et des excès de vin de cette armée indisciplinée.  

 Et il ajoute une aventure arrivée au maire d’Ampilly :    

 Le 14 janvier, l’heure du départ sonnée, le commandant s’informe si tous les hommes et les ch evaux requis sont partis pour Châtillon. Les notes prises par la poste, n’en constatant que la moitié, le commandant fait emmener aussitôt, comme prisonnier de guerre, M. Montenot, maire, qui, en sabots, est obligé de suivre l’armée par une neige toute verglacée. Ce n’est qu’à Darbois, commune de Buncey, que M. Montenot a pu se procurer des souliers, l’armée ennemie ayant quitté la route 71, pour prendre une voie rurale passant par Darbois, la Grange-Emery, et gagner la route n° 13. Bientôt M. Montenot voit arriver ses voituriers réquisitionnés, ceux-ci ayant passé par des voies détournées pour se rendre à Châtillon ; il en avertit aussitôt le commandant qui, pour toute réponse, lui présenta un cigare.                                                                              Le lendemain, M. Montenot, arrivé à Maisey, pouvait regagner son domicile, fort heureux d’être débarrassé de ses impérieux compagnons de voyage. Quant aux voituriers, la majeure partie n’a été qu’à Leuglay, deux seulement, MM. Mongin et Gillot, sont allés jusqu’à Champlitte

(le quartier général allemand, parti de Châtillon le 14, s’était établi le soir à Voulaines)

 Dominique Masson  (remerciements à M. Massé)

 

[1]Goutey L. : monographie de la commune d’Ampilly-le-Sec ; cahiers du Châtillonnais, n° 85

 

[2] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien » ; traduction par E. Costa de Serda ; 1882

[3] La Bourgogne pendant la guerre et l’occupation allemande (1870-1871), d’après la gazette de Carlsruhe ; traduction du Dr Louis Marchant ; Dijon, 1875

[4] Garibaldi Ricciotti :« Souvenirs de la campagne de France 1870-71, commandant la 4me brigade de l’Armée des Vosges » ; traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[5] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4me brigade ; récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[6]Goutey L: op. cit.

[7] Thiebault ; op. cit.

[8] Gazette de Carlsruhe, op. cit.

[9] Légey Léon : Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon ; Châtillon-sur-Seine, Leclerc, 1899

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 1 Mars 2021

 Dominique Masson continue de nous conter ce qui se passa dans le Châtillonnais  durant la guerre de 1870.

Après la fameuse "surprise de Châtillon", les villages voisins ne furent pas épargnés...

Merci à lui pour ses passionnantes recherches historiques.

Notule d’histoire

Prussiens et francs-tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871

 

Le 14 octobre 1870, Giuseppe Garibaldi installait son état-major à Dôle et organisait l’armée des Vosges en quatre brigades.

Du 4 au 7 novembre, s’organisait la quatrième brigade, sous le commandement de Ricciotti Garibaldi.

Mais, selon l’instituteurd’Ampilly, L. Goutey,[1]le 5 novembre, une trentaine de « garibaldiens » passa à Ampilly, se dirigeant vers Semur ; peut-être était-ce un groupe qui voulait se joindre à Garibaldi (Ricciotti sera à Semur le 17).

 Le 19 novembre, de 6 heures à 10 heures du matin, la quatrième brigade de l’armée des Vosges, commandée par Ricciotti Garibaldi effectuait une « surprise » sur Châtillon.

                                                                          Le général prussien Eugène Antoine Théophile von Podbielski, quartier-maître à l’état-major prussien, dans la 96e dépêche (Berlin, 22 novembre) datée du 21 novembre, de Versailles, relatait le fait :

Les gardes mobiles battus à Dreux et Châteauneuf ont pris la fuite vers l’ouest et le nord-ouest.                                                                        

Le 19, le bataillon de la Landwehr Unna et deux escadrons  du 5e régiment des hussards de réserve ont été attaqués à Châtillon ; ils se sont retirés avec une perte de 120 hommes et de 70 chevaux, sur Châteauvillain.                            

Des autres armées, il n’y a pas de communications marquantes.

A Châtillon, stationnaient les 1re, 2e et 4e compagnies d’Unna (soit 460 hommes) .

Unna est une ville dans le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie), et la 2e compagnie du 5e hussard de réserve (avec 94 chevaux), sous le commandement du colonel Lettgau.

C’étaient des troupes reléguées en deuxième ligne.  

 Les pertes subies par l’armée prussienne furent largement surestimées.

Encore après-guerre, dans le rapport de la section historique du grand état-major prussien, celui-ci comptabilise, pour le bataillon Unna, 2 officiers ou sous-officiers blessés et 5 disparus et, pour les hommes, 12 tués et 8 blessés.

Pour le régiment de hussards, il y avait un officier tué, ainsi qu’un homme et un autre blessé, mais 44 disparus (plus 74 chevaux disparus).

Il faut y ajouter un payeur, Schmidt (Ricciotti s’était emparé de la caisse du régiment), et un médecin aide-major, le docteur Hensgen[2].

 "Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

 

figure 1 :Grenest "l'armée de l'Est-Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. paris 1895

 

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 2 : 96ème dépêche allemande annonçant la "surprise de Châtillon"

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

figure 3 :tableau des pertes subies selon l'armée prussienne "à la guerre franco-allemande" op cité

Selon Garibaldi, il y eut 164 soldats et 13 officiers prisonniers, 72 chevaux et 6 voitures de matériel, notamment celle de la poste (plus deux cantinières « très laides »).

A Tours, on annonça que :

l’ennemi a été surpris à Châtillon (département de la Côte d’Or) par les troupes garibaldiennes sous le commandement de Ricciotti. Tout a été tué ou fait prisonnier : 7 à 800 hommes environ[3].                                                                                             

En fait, il semble qu’il n’y ait eu que 14 soldats tués du côté prussien et 6 pour les garibaldiens.

Après son attaque, Garibaldi et ses hommes repartirent vers Coulmier:        

il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après une telle expédition.

Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi de tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes[4].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 4 : Grenest "l'armée de l'Est-relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Paris 1895

Edmond Thiébaut raconte aussi [5]:

Les prisonniers marchaient au centre de la colonne entre les deux files des compagnies.

La garde des officiers était confiée aux chasseurs des alpes ; l’attitude de ces Allemands était fière et résignée.

Ils semblaient considérer avec étonnement la franche gaîté de nos francs-tireurs.

Parmi les soldats, on remarquait un mélange singulier de toutes les armes.

On y trouvait les costumes de la landwehr, des chasseurs, à pied, de divers régiments d’infanterie de ligne, des hussards, des chasseurs à cheval, des soldats de l’intendance, de l’ambulance, des postes ; des musiciens, des tambours, des fifres et un splendide canne-major.

La plupart d’entre eux étaient tremblants et désolés, protestant dans une langue impossible de leur amitié pour les francs-tireurs, et proférant contre Guillaume et Bismarck les plus dures imprécations …

Sur toute notre route, nous recevions les ovations des habitants des villages que nous traversions…

La cavalerie fermait la marche ; ce n’était pas le côté le moins curieux du cortège.

On avait hissé sur les chevaux les hommes blessés ou fatigués qui ne pouvaient suivre la colonne.

Ces cavaliers de circonstance étaient comme leurs camarades coiffés du paratonnerre ou du colback des hussards ; cet ensemble formait un escadron de l’effet le plus grotesque.

Sur leur route, ils passèrent par Ampilly.

Pendant leur arrêt, un coup de feu frappa dans la région du cœur un franc-tireur suisse, né à Neuchâtel, nommé Louis Perrey.

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figur 5 : Décès de Louis Perrey, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Ce n’est que deux mois plus tard qu’il succombait à ses blessures, le 12 janvier 1871, âgé de 43 ans,au domicile de Marie Collin, sœur institutrice.(depuis 1854, un don avait été fait pour la venue des sœurs congréganistes, mais il n’y eut qu’une institutrice en poste, madame Collin, en religion sœur Juliette).

Selon l’instituteur L. Goutey, le soir du même jour (19 novembre), un autre passage de francs-tireurs eut lieu ; un soldat a été, dit-on, tué par vengeance, par un de ses camarades florentins,  Egiste Cortepassé[6].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 6 : décès d'Egiste Cortepassé, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Agé de 22 ans,né à Florence, il décéda à l’auberge de Basile Cazet.

 Ces tombes n’existent plus au cimetière d’Ampilly, alors qu’elles auraient dû bénéficier de la loi du 4 avril 1873, relative aux tombes de militaires morts pendant cette guerre, et garantissant leur protection.

                                                                                              Les garibaldiens partirent vers Coulmier

  Là, on savait déjà notre succès et notre retour était attendu avec impatience…

Aussitôt notre arrivée au centre du village, les prisonniers furent conduits dans la mairie qui avait été disposée pour les recevoir.

On s’occupa de les ravitailler et on les laissa sous la garde d’un poste solide.

Les officiers, libres sur parole, purent entrer à l’auberge où un repas leur avait été préparé.

Dans la même journée, ils partaient pour Autun, accompagnés seulement de deux officiers choisis pour ce service…

Dès le jour, les prisonniers confiés à la garde nationale de Montbard se mettaient en route.

La garde nationale de Semur devait les venir chercher et les remettre entre les mains du détachement envoyé à cet effet à Saulieu[7].                           

 Selon le Progrès de Lyon, du 26 novembre :                                                    

Avant-hier, 200 ( ?) Prussiens faits prisonniers à Châtillon par les Garibaldiens sont arrivés sous l’escorte de francs-tireurs.

Parmi eux se trouvent neuf officiers qui sont descendus à l’hôtel d’Angleterre et à l’hôtel des Deux-Mondes.

Les soldats ont été internés au fort des Charpennes[8]

(parmi les manquants, la Gazette de Westphalie avait recensé, le premier décembre, les premiers lieutenants de Werthern et Kemper ; le lieutenant Brinkmann ; les vice-feldwebels Mellin et Thiene ; le payeur Schmidt et le docteur Hensgen).                                      

Quelques francs-tireurs avaient été blessés lors de l’attaque sur Châtillon et faits prisonniers.

Le 13 janvier 1871, trois francs-tireurs soignés à l’hôpital à la suite de leurs blessures sont conduits en Allemagne (avec Boucquart, meunier à Vix, accusé d’avoir tiré sur une patrouille allemande, le 30 novembre)[9].

Les prussiens avaient déjà paru à Ampilly le 11 novembre, au nombre de 25.

Après l’attaque sur Châtillon, ils revinrent le 5 décembre ; les Allées furent occupées par des soldats tandis que d’autres faisaient des perquisitions à la recherche d’armes.

Jusqu’au 14, il y eut passage d’éclaireurs ennemis.

Mais il y eut deux grands séjours de l’armée prussienne à Ampilly.

Le premier fut du 14 au 17 décembre 1870.

Parmi les officiers, se trouvait  un jeune homme de 18 ans, le prince Hermann de Schambourg-Lippe.

Le père de ce jeune prince, Adolphe Ier, qui était chef de cohorte et accompagnait le général von Zastrow, stationna à Châtillon, du 14 au 18 décembre.

Profitant de son séjour à Châtillon, il vint dans la soirée du 16 décembre, visiter Ampilly et voir son fils.

Le second eut lieu du 11 au 14 janvier 1871.

Déjà, le 8, arrivèrent pour la nuit, 500 soldats prussiens.

Le 11, ce fut 1200 chasseurs puis, les trois autres jours, 1500 chasseurs et artilleurs.

Car c’est à Châtillon que le général de cavalerie, baron von Manteuffel, réunit la nouvelle armée, dite armée du sud, composée des IIeet VIIe corps d’armée (plus le XIVe corps d’armée, totalisant ensemble 118 bataillons, 54 escadrons et 51 batteries), pour attaquer Dijon défendu par Garibaldi et repousser l’armée de Bourbaki. 

Selon l’instituteur Goutey

Les habitants eurent à se plaindre des chefs et des soldats ; l’on n’avait pas encore vu chefs plus orgueilleux et plus exigeants, domestiques plus impérieux et grossiers, soldats plus dédaigneux.

Le pays a eu à souffrir des exigences, des rapines et des excès de vin de cette armée indisciplinée.  

 Et il ajoute une aventure arrivée au maire d’Ampilly :    

 Le 14 janvier, l’heure du départ sonnée, le commandant s’informe si tous les hommes et les ch evaux requis sont partis pour Châtillon. Les notes prises par la poste, n’en constatant que la moitié, le commandant fait emmener aussitôt, comme prisonnier de guerre, M. Montenot, maire, qui, en sabots, est obligé de suivre l’armée par une neige toute verglacée. Ce n’est qu’à Darbois, commune de Buncey, que M. Montenot a pu se procurer des souliers, l’armée ennemie ayant quitté la route 71, pour prendre une voie rurale passant par Darbois, la Grange-Emery, et gagner la route n° 13. Bientôt M. Montenot voit arriver ses voituriers réquisitionnés, ceux-ci ayant passé par des voies détournées pour se rendre à Châtillon ; il en avertit aussitôt le commandant qui, pour toute réponse, lui présenta un cigare.                                                                              Le lendemain, M. Montenot, arrivé à Maisey, pouvait regagner son domicile, fort heureux d’être débarrassé de ses impérieux compagnons de voyage. Quant aux voituriers, la majeure partie n’a été qu’à Leuglay, deux seulement, MM. Mongin et Gillot, sont allés jusqu’à Champlitte

(le quartier général allemand, parti de Châtillon le 14, s’était établi le soir à Voulaines)

 Dominique Masson  (remerciements à M. Massé)

 

[1]Goutey L. : monographie de la commune d’Ampilly-le-Sec ; cahiers du Châtillonnais, n° 85

 

[2] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien » ; traduction par E. Costa de Serda ; 1882

[3] La Bourgogne pendant la guerre et l’occupation allemande (1870-1871), d’après la gazette de Carlsruhe ; traduction du Dr Louis Marchant ; Dijon, 1875

[4] Garibaldi Ricciotti :« Souvenirs de la campagne de France 1870-71, commandant la 4me brigade de l’Armée des Vosges » ; traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[5] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4me brigade ; récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[6]Goutey L: op. cit.

[7] Thiebault ; op. cit.

[8] Gazette de Carlsruhe, op. cit.

[9] Légey Léon : Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon ; Châtillon-sur-Seine, Leclerc, 1899

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 1 Mars 2021

 Dominique Masson continue de nous conter ce qui se passa dans le Châtillonnais  durant la guerre de 1870.

Après la fameuse "surprise de Châtillon", les villages voisins ne furent pas épargnés...

Merci à lui pour ses passionnantes recherches historiques.

Notule d’histoire

Prussiens et francs-tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871

 

Le 14 octobre 1870, Giuseppe Garibaldi installait son état-major à Dôle et organisait l’armée des Vosges en quatre brigades.

Du 4 au 7 novembre, s’organisait la quatrième brigade, sous le commandement de Ricciotti Garibaldi.

Mais, selon l’instituteurd’Ampilly, L. Goutey,[1]le 5 novembre, une trentaine de « garibaldiens » passa à Ampilly, se dirigeant vers Semur ; peut-être était-ce un groupe qui voulait se joindre à Garibaldi (Ricciotti sera à Semur le 17).

 Le 19 novembre, de 6 heures à 10 heures du matin, la quatrième brigade de l’armée des Vosges, commandée par Ricciotti Garibaldi effectuait une « surprise » sur Châtillon.

                                                                          Le général prussien Eugène Antoine Théophile von Podbielski, quartier-maître à l’état-major prussien, dans la 96e dépêche (Berlin, 22 novembre) datée du 21 novembre, de Versailles, relatait le fait :

Les gardes mobiles battus à Dreux et Châteauneuf ont pris la fuite vers l’ouest et le nord-ouest.                                                                        

Le 19, le bataillon de la Landwehr Unna et deux escadrons  du 5e régiment des hussards de réserve ont été attaqués à Châtillon ; ils se sont retirés avec une perte de 120 hommes et de 70 chevaux, sur Châteauvillain.                            

Des autres armées, il n’y a pas de communications marquantes.

A Châtillon, stationnaient les 1re, 2e et 4e compagnies d’Unna (soit 460 hommes) .

Unna est une ville dans le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie), et la 2e compagnie du 5e hussard de réserve (avec 94 chevaux), sous le commandement du colonel Lettgau.

C’étaient des troupes reléguées en deuxième ligne.  

 Les pertes subies par l’armée prussienne furent largement surestimées.

Encore après-guerre, dans le rapport de la section historique du grand état-major prussien, celui-ci comptabilise, pour le bataillon Unna, 2 officiers ou sous-officiers blessés et 5 disparus et, pour les hommes, 12 tués et 8 blessés.

Pour le régiment de hussards, il y avait un officier tué, ainsi qu’un homme et un autre blessé, mais 44 disparus (plus 74 chevaux disparus).

Il faut y ajouter un payeur, Schmidt (Ricciotti s’était emparé de la caisse du régiment), et un médecin aide-major, le docteur Hensgen[2].

 "Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

 

figure 1 :Grenest "l'armée de l'Est-Relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. paris 1895

 

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 2 : 96ème dépêche allemande annonçant la "surprise de Châtillon"

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

figure 3 :tableau des pertes subies selon l'armée prussienne "à la guerre franco-allemande" op cité

Selon Garibaldi, il y eut 164 soldats et 13 officiers prisonniers, 72 chevaux et 6 voitures de matériel, notamment celle de la poste (plus deux cantinières « très laides »).

A Tours, on annonça que :

l’ennemi a été surpris à Châtillon (département de la Côte d’Or) par les troupes garibaldiennes sous le commandement de Ricciotti. Tout a été tué ou fait prisonnier : 7 à 800 hommes environ[3].                                                                                             

En fait, il semble qu’il n’y ait eu que 14 soldats tués du côté prussien et 6 pour les garibaldiens.

Après son attaque, Garibaldi et ses hommes repartirent vers Coulmier:        

il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après une telle expédition.

Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi de tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes[4].

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figure 4 : Grenest "l'armée de l'Est-relation anecdotique de la campagne de 1870-1871. Paris 1895

Edmond Thiébaut raconte aussi [5]:

Les prisonniers marchaient au centre de la colonne entre les deux files des compagnies.

La garde des officiers était confiée aux chasseurs des alpes ; l’attitude de ces Allemands était fière et résignée.

Ils semblaient considérer avec étonnement la franche gaîté de nos francs-tireurs.

Parmi les soldats, on remarquait un mélange singulier de toutes les armes.

On y trouvait les costumes de la landwehr, des chasseurs, à pied, de divers régiments d’infanterie de ligne, des hussards, des chasseurs à cheval, des soldats de l’intendance, de l’ambulance, des postes ; des musiciens, des tambours, des fifres et un splendide canne-major.

La plupart d’entre eux étaient tremblants et désolés, protestant dans une langue impossible de leur amitié pour les francs-tireurs, et proférant contre Guillaume et Bismarck les plus dures imprécations …

Sur toute notre route, nous recevions les ovations des habitants des villages que nous traversions…

La cavalerie fermait la marche ; ce n’était pas le côté le moins curieux du cortège.

On avait hissé sur les chevaux les hommes blessés ou fatigués qui ne pouvaient suivre la colonne.

Ces cavaliers de circonstance étaient comme leurs camarades coiffés du paratonnerre ou du colback des hussards ; cet ensemble formait un escadron de l’effet le plus grotesque.

Sur leur route, ils passèrent par Ampilly.

Pendant leur arrêt, un coup de feu frappa dans la région du cœur un franc-tireur suisse, né à Neuchâtel, nommé Louis Perrey.

"Prussiens et Francs-Tireurs à Ampilly-le-Sec en 1870-1871", un notule d'hisoire de Dominique Masson

Figur 5 : Décès de Louis Perrey, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Ce n’est que deux mois plus tard qu’il succombait à ses blessures, le 12 janvier 1871, âgé de 43 ans,au domicile de Marie Collin, sœur institutrice.(depuis 1854, un don avait été fait pour la venue des sœurs congréganistes, mais il n’y eut qu’une institutrice en poste, madame Collin, en religion sœur Juliette).

Selon l’instituteur L. Goutey, le soir du même jour (19 novembre), un autre passage de francs-tireurs eut lieu ; un soldat a été, dit-on, tué par vengeance, par un de ses camarades florentins,  Egiste Cortepassé[6].

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Figure 6 : décès d'Egiste Cortepassé, état-civil d'Ampilly-le-Sec

Agé de 22 ans,né à Florence, il décéda à l’auberge de Basile Cazet.

 Ces tombes n’existent plus au cimetière d’Ampilly, alors qu’elles auraient dû bénéficier de la loi du 4 avril 1873, relative aux tombes de militaires morts pendant cette guerre, et garantissant leur protection.

                                                                                              Les garibaldiens partirent vers Coulmier

  Là, on savait déjà notre succès et notre retour était attendu avec impatience…

Aussitôt notre arrivée au centre du village, les prisonniers furent conduits dans la mairie qui avait été disposée pour les recevoir.

On s’occupa de les ravitailler et on les laissa sous la garde d’un poste solide.

Les officiers, libres sur parole, purent entrer à l’auberge où un repas leur avait été préparé.

Dans la même journée, ils partaient pour Autun, accompagnés seulement de deux officiers choisis pour ce service…

Dès le jour, les prisonniers confiés à la garde nationale de Montbard se mettaient en route.

La garde nationale de Semur devait les venir chercher et les remettre entre les mains du détachement envoyé à cet effet à Saulieu[7].                           

 Selon le Progrès de Lyon, du 26 novembre :                                                    

Avant-hier, 200 ( ?) Prussiens faits prisonniers à Châtillon par les Garibaldiens sont arrivés sous l’escorte de francs-tireurs.

Parmi eux se trouvent neuf officiers qui sont descendus à l’hôtel d’Angleterre et à l’hôtel des Deux-Mondes.

Les soldats ont été internés au fort des Charpennes[8]

(parmi les manquants, la Gazette de Westphalie avait recensé, le premier décembre, les premiers lieutenants de Werthern et Kemper ; le lieutenant Brinkmann ; les vice-feldwebels Mellin et Thiene ; le payeur Schmidt et le docteur Hensgen).                                      

Quelques francs-tireurs avaient été blessés lors de l’attaque sur Châtillon et faits prisonniers.

Le 13 janvier 1871, trois francs-tireurs soignés à l’hôpital à la suite de leurs blessures sont conduits en Allemagne (avec Boucquart, meunier à Vix, accusé d’avoir tiré sur une patrouille allemande, le 30 novembre)[9].

Les prussiens avaient déjà paru à Ampilly le 11 novembre, au nombre de 25.

Après l’attaque sur Châtillon, ils revinrent le 5 décembre ; les Allées furent occupées par des soldats tandis que d’autres faisaient des perquisitions à la recherche d’armes.

Jusqu’au 14, il y eut passage d’éclaireurs ennemis.

Mais il y eut deux grands séjours de l’armée prussienne à Ampilly.

Le premier fut du 14 au 17 décembre 1870.

Parmi les officiers, se trouvait  un jeune homme de 18 ans, le prince Hermann de Schambourg-Lippe.

Le père de ce jeune prince, Adolphe Ier, qui était chef de cohorte et accompagnait le général von Zastrow, stationna à Châtillon, du 14 au 18 décembre.

Profitant de son séjour à Châtillon, il vint dans la soirée du 16 décembre, visiter Ampilly et voir son fils.

Le second eut lieu du 11 au 14 janvier 1871.

Déjà, le 8, arrivèrent pour la nuit, 500 soldats prussiens.

Le 11, ce fut 1200 chasseurs puis, les trois autres jours, 1500 chasseurs et artilleurs.

Car c’est à Châtillon que le général de cavalerie, baron von Manteuffel, réunit la nouvelle armée, dite armée du sud, composée des IIeet VIIe corps d’armée (plus le XIVe corps d’armée, totalisant ensemble 118 bataillons, 54 escadrons et 51 batteries), pour attaquer Dijon défendu par Garibaldi et repousser l’armée de Bourbaki. 

Selon l’instituteur Goutey

Les habitants eurent à se plaindre des chefs et des soldats ; l’on n’avait pas encore vu chefs plus orgueilleux et plus exigeants, domestiques plus impérieux et grossiers, soldats plus dédaigneux.

Le pays a eu à souffrir des exigences, des rapines et des excès de vin de cette armée indisciplinée.  

 Et il ajoute une aventure arrivée au maire d’Ampilly :    

 Le 14 janvier, l’heure du départ sonnée, le commandant s’informe si tous les hommes et les ch evaux requis sont partis pour Châtillon. Les notes prises par la poste, n’en constatant que la moitié, le commandant fait emmener aussitôt, comme prisonnier de guerre, M. Montenot, maire, qui, en sabots, est obligé de suivre l’armée par une neige toute verglacée. Ce n’est qu’à Darbois, commune de Buncey, que M. Montenot a pu se procurer des souliers, l’armée ennemie ayant quitté la route 71, pour prendre une voie rurale passant par Darbois, la Grange-Emery, et gagner la route n° 13. Bientôt M. Montenot voit arriver ses voituriers réquisitionnés, ceux-ci ayant passé par des voies détournées pour se rendre à Châtillon ; il en avertit aussitôt le commandant qui, pour toute réponse, lui présenta un cigare.                                                                              Le lendemain, M. Montenot, arrivé à Maisey, pouvait regagner son domicile, fort heureux d’être débarrassé de ses impérieux compagnons de voyage. Quant aux voituriers, la majeure partie n’a été qu’à Leuglay, deux seulement, MM. Mongin et Gillot, sont allés jusqu’à Champlitte

(le quartier général allemand, parti de Châtillon le 14, s’était établi le soir à Voulaines)

 Dominique Masson  (remerciements à M. Massé)

 

[1]Goutey L. : monographie de la commune d’Ampilly-le-Sec ; cahiers du Châtillonnais, n° 85

 

[2] « La guerre franco-allemande de 1870-71, rédigée par la section historique du grand état-major prussien » ; traduction par E. Costa de Serda ; 1882

[3] La Bourgogne pendant la guerre et l’occupation allemande (1870-1871), d’après la gazette de Carlsruhe ; traduction du Dr Louis Marchant ; Dijon, 1875

[4] Garibaldi Ricciotti :« Souvenirs de la campagne de France 1870-71, commandant la 4me brigade de l’Armée des Vosges » ; traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[5] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4me brigade ; récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[6]Goutey L: op. cit.

[7] Thiebault ; op. cit.

[8] Gazette de Carlsruhe, op. cit.

[9] Légey Léon : Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon ; Châtillon-sur-Seine, Leclerc, 1899

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 6 Février 2021

Dominique Masson nous raconte aujourd'hui la vie d'une femme extraordinaire, qui séjourna dans le Châtillonnais durant le fameux épisode de "La surprise de Châtillon". On la vit en action à Châtillon, mais aussi à Aignay le Duc et à Baigneux.

Une vie passionnante que Dominique Masson nous restitue si bien, merci à lui  de nous la faire connaître !

Notule  d’histoire :

Jessie White Mario

Cette femme fut surnommée « Miss Ouragan », et, pour Mazzini, ce fut la Jeanned’Arc du Risorgimento. 

                                                                      Jessie White est en effet une femme hors du commun, moderne et rebelle. Le poète Giosué Carducci, qui sera prix Nobel de littérature, dira d’elle : C'est une femme formidable, à qui nous, Italiens, devons beaucoup.

 

"Jessie White Mario", la "Jeanne d'Arc du Risorgimento", un notule d'histoire de Dominique Masson

(Figure 1 :Jessie White Mario)

Elle est née le 9 mai 1832,dans un petit village près de Portsmouth, en Angleterre, d’une famille de riches armateurs.

Après avoir étudié la théologie en Angleterre, elle vint prendre des cours de philosophie à la Sorbonne, de 1852 à 1854.

C’est là qu’elle fit la connaissance d’Emma Roberts, très proche de Giuseppe Garibaldi et, l’ayant rencontré et frappée par son charme, décida de consacrer le reste de sa vie à la cause de la liberté de l’Italie.                        

Car, à cette époque, l’Italie est morcelée entre de nombreux territoires, certains sous domination étrangère.

En 1855, elle retourne en Angleterre, fréquente la faculté de médecine, mais on lui interdit de devenir la première femme médecin d’Angleterre.

Elle écrira alors:

"Je suis convaincue que la meilleure façon de faire travailler d’autres femmes est de commencer à décrocher un travail pratique nous-mêmes…

Mais pour diverses raisons, je suis contente d’avoir vécu cette expérience."

Elle va également rencontrer Giuseppe Mazzini, révolutionnaire et patriote italien, alors en exil à Londres ; c’est l’un des leaders du Risorgimento (« Résurgence », « Renaissance »),qui prône l'unification italienne.

                                                                                            Jessie va s’engager dans une intense campagne de conférences, rédige des articles de journaux, collecte de fonds, visant à soutenir les patriotes italiens.

En 1857, elle suit Mazzini en Italie qui veut préparer une expédition dans le sud de l’Italie.

Arrêtée, elle passera quatre mois en prison ; c’est là qu’elle fera la connaissance d’Alberto Mario, qu’elle épousera cinq mois plus tard, en Angleterre.

Ils feront un voyage à New-York, défendant la cause del’unité italienne, où ils écriront pour le New-York Times,le Herald et le Post.  

Revenus en Italie en 1860, ils suivront Garibaldi dans son expédition des mille, en 1861, qui verra l’unification presque complète de l’Italie  [i].

Elle sera infirmière du corps de santé militaire dans quatre campagnes de Garibaldi, se dévouant à lui ; par exemple, lors de la bataille du Volturno, en 1860, elle sortira sous le feu pour sauver Garibaldi et, à la bataille de l’Aspromonte, en 1862, elle assiste le médecin qui soigne sa blessure. 

Son activité d’infirmière n’a pas interrompu son activité journalistique ; elle est correspondante, en Italie, pour le Morning Star, le Scotsman et aussi le Nacion de Buenos Aires.

Ainsi, elle va attirer l’attention du public britannique sur les chemises rouges ; elle fut alors la première femme journaliste britannique, envoyée sur le front de la guerre en Italie.

A l’occasion, elle est aussi espionne pour le compte de Garibaldi. Elle recevra, à la fin de la guerre en Italie, deux médailles d’or des Napolitains, en signe de gratitude.

L’unité italienne étant réalisée en 1870, Jessie White Mario suivra Garibaldi, qui a offert ses services à la République française,proclamée le 4 septembre 1870,en lutte contre l’envahisseur prussien  [ii].

Il débarque à Marseille le 7 octobre 1870 et place son état-major à Dole le14 octobre. Le 11 novembre, il organise l’armée des Vosges en quatre brigades sous le commandement, entre autre, de ses deux fils, Ricciotti et Menotti.                      

Jessie White Mario sera affectée à la quatrième brigade, commandée par Ricciotti Garibaldi, en tant que responsable des ambulances : Hardie comme un soldat et dévouée à nos malades, elle dépensait à leur service beaucoup de son temps et aussi de son argent, dira d’elle Grenest  [iii].

Un lieutenant de l’état-major de la quatrième brigade rajoute : Mme Mario était douée d’un courage rare. Là où sifflaient les balles, on la voyait toujours paraître pour soigner les blessés.

Dans cette campagne, elle suppléa à l’insuffisance des ambulances.

C’est grâce à elle que des jeunes soldats sont encore de ce monde. Grâce à elle aussi, les Anglais envoyèrent pour plus de 25 000 fr. d’instruments de chirurgie et de médicaments.

Agée d’une quarantaine d’années, elle en paraissait à peine trente. Vivant toujours au milieu des soldats et respectée de tous [iv].

Lors de la « surprise » de Ricciotti Garibaldi à Châtillon, le 19 novembre 1870, ce dernier avait restitué le personnel d’une ambulance et l’expédia par le plus court chemin ; seulement, lorsque Ricciotti chargea Jessie Mario de réclamer nos médecins, quelques semaines après, les allemands ne les renvoyèrent que par la Suisse, et ce long détour nous en priva pour tout le reste de la campagne.

C’est à Châtillon que Madame Mario avait conduit cette petite négociation.

Dame d’origine anglaise, et femme d’un député Italien, madame Mario écrivait des correspondances aux journaux anglais et commandait l’ambulance de la quatrième brigade…

A Châtillon, elle fit une découverte grave.

Les Allemands, maîtres de l’hôpital, avaient relégué les francs-tireurs blessés dans une salle basse et humide.

Jessie Mario ne cachait pas ses sympathies pour les Allemands.

Mais, ce jour-là, elle leur cingla la figure de quelques bonnes vérités.

« Vous soignerez nos francs-tireurs comme vos soldats, leur dit-elle, et nous en aurons la preuve. Sinon vos blessés paieront pour les nôtres, tête pour tête ».

Ce ne fut pas l’incident le moins surprenant de cette surprise que cette rencontre de l’Anglaise, qui montrait les dents, et de l’Allemand qui, rouge de colère, bégayait je ne sais quelle explication banale [v] 

Cette « visite » avait été suivie par des habitants de Châtillon qui furent fort intrigués par cette dame.

Nous retrouvons ensuite Jessie Mario à Aignay-le-Duc.

Après la bataille de Baigneux, le 11 janvier, Ricciotti s’était installé dans ce village.

Le maire, M. Misset, a fourni une description du passage de Ricciotti :

"Sur les deux heures du matin arriva tout à coup dans ma cour une voiture de deux chevaux amenant une dame anglaise, Mme White-Marion.

Elle venait de Châtillon traiter, disait-elle, de l’échange de médecins pris par les allemands, mais plutôt pour savoir ce qui se passait à Châtillon et le rapporter à Ricciotti.

Cette dame faisait partie de la Brigade en qualité de Directrice des ambulances.

Elle raconta aux chefs les mouvements des troupes prussiennes qui se dessinaient du côté de l’est, annonçant qu’il y avait à Châtillon et dans les environs une véritable armée de 50 ou 60 000 hommes ; elle donna d’autres renseignements que je n’ai pas entendus  [vi].                                               

Voici enfin le témoignage de Ricciotti :

"Vers minuit, je m’étais jeté sur un lit, si fatigué que je n’avais même pas débouclé le ceinturon de mon sabre, et aussitôt je m’étais endormi, lorsque l’officier de service vint m’éveiller en me disant que Madame Mario venait d’arriver et qu’elle voulait me voir tout de suite.

J’allai à elle. La bonne dame s’était rendue à Langres  [vii] pour l’échange de quelques ambulances et, pendant sa route, les ennemis l’avaient faite prisonnière.

Maintenant, elle retournait à Dijon avec un sauf-conduit prussien.

Elle doutait que nous puissions sortir de notre situation dont elle connaissait bien le danger, car elle venait de traverser les lignes prussiennes jusqu’à Aignay.

Elle m’informa à quel point était occupée la campagne autour de nous, et elle me donna des renseignements :

« Chaque hameau et chaque village, dit-elle, regorgeaient de troupes. On voyait des lumières dans toutes les maisons et on rencontrait des sentinelles à chaque deux milles  [viii]".

Repliée sur Dijon, Jessie Mario va participer à la troisième bataille autour de cette ville, du 21 au 23 janvier 1871.

Là, elle assistera à une scène horrible ;au château de Pouilly, que les Prussiens occupaient, ils prirent un prisonnier légèrement blessé, l’attachèrent et y mirent le feu.

Lorsque les garibaldiens reprirent le château, ils découvrirent l’horreur.

L’Anglaise Mario elle-même, qui, jusqu’alors avait tenu pour les Prussiens, et qui l’avoue, écrivit ce soir-là que

« désormais son âme entière se révoltait contre eux  [ix] ».

Au combat de Lantenay, Jessie assiste le médecin de la quatrième brigade dans ses soins aux blessés.

Le 10 mars 1871, le corps des volontaires garibaldiens est dissous et Garibaldi rentre en Italie.

C’est aussi ce que fera Jessie Mario et elle prendra la nationalité italienne.

Abandonnant le combat politique elle se tournera vers d’autres formes de combats.

Elle va se consacrer aux œuvres sociales, en particulier la misère à  Naples ou la condition de travail des mineurs de Sicile.

En 1879, le président du conseil des ministres italien écrit :

"La démocratie n’a qu’un seul écrivain social et c’est un Anglais et une femme, madame Jessie Mario, qui ne manque jamais, où il y a de souffrir, d’oser pour une noble cause."        

Elle écrit aussi sur la condition des femmes en Italie, ce qui ne contribua pas à le rendre populaire dans les milieux conservateurs.

Un historien réactionnaire s’acharna sur elle en l’accusant de faire tourner la tête de Garibaldi et de ses camarades et en la décrivant comme ayant une conduite sexuelle redoutable pendant qu’elle s’occupait des blessés ; il l’accusait aussi de fréquenter les hôpitaux plutôt pour chercher de beaux jeunes hommes que pour soigner les malades dont ses caresses retardaient la guérison  [x].                               

Elle se consacrera aussi, à la fin de sa vie, à écrire l’histoire du mouvement national, publiant les écrits de son mari, décédé en 1883, et rédigeant des biographies, en particulier celles de Garibaldi et de Mazzini.   

Décédée à Florence en 1906, où elle avait obtenu une chaire de littérature anglaise à l’université de cette ville, elle sera enterrée à Lendirana, près de Rovigo, auprès de son mari.Plusieurs rues en Italie portent son nom et celui de son mari.

"Jessie White Mario", la "Jeanne d'Arc du Risorgimento", un notule d'histoire de Dominique Masson

(Figure 2 : Alberto Mario, député italien de 1861 à 1865)

 (Dominique Masson)

"Jessie White Mario", la "Jeanne d'Arc du Risorgimento", un notule d'histoire de Dominique Masson

(Figure 3 : médecins prussiens à Châtillon en 1870, collection Dominique Masson)

 

 [i]l'unification du royaume d'Italie qui est proclamé le 17 mars 1861

[ii] La guerre elle-même avait commencé le 19 juillet 1870, entre Napoléon III et le roi Guillaume de Prusse

[iii] Grenest : «  l’armée de l’Est-relations anecdotiques de la campagne de 1870-1871 » ; Paris, 1895

[iv] Garibaldi Ricciotti : « souvenirs de la campagne de 1870 », Nice, 1899 ; déjà, lors de «  l’expédition des mille », elle avait réussi à faire organiser une souscription en Angleterre et Victor Hugo fut sollicitépar les habitants de Jersey pour aussi recueillir des fonds

[v] Dormoy P.A : « souvenirs d’avant-garde » ; Paris, 1887 ; p. 92, 186, 198

[vi] Molis Robert : «  les Francs-Tireurs et les Garibaldi » ; Editions Tyrésias, 1995

[vii] Il semble que ce soit Châtillon, comme le dit le maire, M. Misset

[viii] Garibaldi Ricciotti : op. cit.

[ix] Article paru dans le Daily-News : « Notes from Dijon », Tuesday, February 7, 1871 ; in “Dormoy”,

[x] Porciani Ilaria : « les historiennes et le Risorgimento » ; Mélanges de l’école française de Rome, tome 112-1, 2000

 

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 8 Janvier 2021

 Dominique Masson continue ses recherches sur la guerre de 1870 dans notre région.

Après la "surprise de Châtillon" :

http://www.christaldesaintmarc.com/la-surprise-de-chatillon-garibaldi-un-notule-d-histoire-de-dominique-m-a204217938

L'exécution de Léon Vigneron" :

http://www.christaldesaintmarc.com/l-execution-de-leon-vigneron-le-19-decembre-1870-un-notule-d-histoire--a204964668

Voici "la bataille de Baigneux-les Juifs", où nous apprenons, avec étonnement, des pans de notre histoire régionale, complètement oubliés par la plupart d'entre nous...

Merci mille fois à Dominique Masson de nous rappeler, si bien, le passé du Châtillonnais !

Notule d’histoire :

 

La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871

 

Le 20 décembre 1870, la quatrième brigade, commandée par Ricciotti Garibaldi, qui s’était déjà illustrée lors de la « surprise » de Châtillon, le 19 novembre 1870,  reçut l’ordre de se tenir prêt et de tout préparer pour une longue expédition.

La météorologie était terrible, la température tombant souvent à 18° au-dessous de zéro et il y avait alternative de neige et de tempêtes ; les hommes avaient de la neige jusqu’à la ceinture et on ne voyait pas à dix mètres.

Aussi il devenait presque impossible de prendre les mesures de sécurité les plus élémentaires et il était impossible de se servir des armes, l’huile gelant dans le mécanisme délicat des fusils à culasse et le métal, à une si basse température, devenait si fragile qu’il y avait toujours danger d’éclatement.

Le temps ne permettait aucun mouvement tactique et contrariait sérieusement le service d’informations.

Aussi le quartier-général de Garibaldi était préoccupé des mouvements des troupes ennemies qui se faisaient sur sa gauche, dans la direction de Tonnerre, Auxerre et Orléans.

Il fut donc décidé de faire une pointe dans cette direction et ce fut la quatrième brigade qui fut choisie pour ce service.         

"La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

 Partie le 23 décembre, dans des conditions climatiques difficiles, la brigade arriva à Château-Chinon.

Repartie le 26 décembre, elle est à Clamecy, puis à Courson, se replie ensuite à Coulanges, puis arrive à Vermenton, le 30 décembre.

Ces mouvements inquiètent les prussiens qui ordonnent au général von Zastrow, commandant le VIIe corps allemand, lequel avait ses positions entre Flavigny, Semur et Montbard, de marcher sur Auxerre.  

Ayant appris que de fortes masses prussiennes se mouvaient sur les routes conduisant à Montbard et à Châtillon, c’est-à-dire vers le sud-est, Ricciotti Garibaldi décida de retourner à Avallon, où il resta du premier au 3 janvier 1871, puis repartit vers Précy-sur-Thil.

Selon les informations reçues, il y avait une forte concentration de troupes prussiennes entre Châtillon et Montbard, cette ville étant occupée par 5 000 prussiens avec de la cavalerie et de l’artillerie.

Les uhlans couraient la campagne pour fourrager et prélever des vivres dans tous les villages environnants.

Ricciotti Garibaldi fit avancer sa brigade jusqu’à Semur, dans l’idée de leur donner la chasse.

Les commandants Michard  et Bailly, bien qu’inférieurs en nombre, les attaquèrent et les mirent en fuite.   

Le 8 janvier, Ricciotti Garibaldi, apprenant qu’une colonne prussienne était sortie de Montbard et se dirigeait vers Semur, résolut d’attaquer Montbard, dont la garnison devait être affaiblie.

Les bagages furent expédiés sur la route de Flavigny et la brigade prit la route de Montbard.

Ayant passé Montfort, la brigade trouva les prussiens qui avaient pris leurs positions à travers de la route et sur la pente de droite.

La brigade utilisa alors un petit chemin  sur la pente gauche.

L’ennemi se retira rapidement et les garibaldiens voulurent couper ce corps de celui qui occupait Crépand.

Après un combat, les garibaldiens se retirèrent, menacés d’être encerclés et, par la vallée de la Brenne, gagnèrent Flavigny, où ils arrivèrent à 4 heures du matin.

Le capitaine Tarelli-Cox réussit même à sauver toutes les voitures de munitions, ce qui permit à la brigade de recharger ses armes [i].     

 [i] Dans cette affaire, Ricciotti eut trois hommes tués et une vingtaine de blessés

 

"La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 2 : monument élevé à Crépand en mémoire des francs-tireurs tués lors du combat du 8 janvier 1871

Ricciotti donna un jour de repos à ses troupes et il fut rejoint à Flavigny par la deuxième brigade de Lobbia.

La situation de Ricciotti n’était pas formidable, se trouvant au milieu des avant-gardes des IIe et VIIe corps prussiens de l’armée de Manteuffel, qui occupaient Villaines, Saint-Marc, Baigneux, Aignay-le-Duc, Montmoyen et Recey

.On crut même que la quatrième brigade était perdue, le sous-préfet de Semur ayant télégraphié, le 9 janvier :

« Ricciotti, après s’être battu toute la journée, est entouré de forces considérables. Ses bagages et ses munitions sont déjà entre les mains de l’ennemi ».

Giuseppe Garibaldi lui-même craignit un temps que son fils ne soit perdu ; il avait dit alors à son chef d’état-major :

« … Nous sommes exposés, vous comme moi, à apprendre d’un moment à l’autre la mort d’un fils, mais nous avions, n’est-ce pas, en venant ici, fait le sacrifice de notre vie et de celle de nos enfants. Dites-moi la vérité, Ricciotti est-il mort ou prisonnier ? [i] » . 

Ricciotti demanda des instructions à son père mais, celui-ci lui laissant toute liberté pour la poursuite de la guerre, ce dernier estima que le plus utile était de continuer à observer les corps prussiens de la région.

La IIe brigade de Cristiano Lobbia et la IVe de Ricciotti allaient chercher à freiner la marche des troupes prussiennes envahissant la Bourgogne depuis le nord-ouest.                                                                                                                                                           Nous avons plusieurs récits sur la bataille de Baigneux : celui de Ricciotti Garibaldi, celui du général Bordone, chef d’état-major de l’armée des Vosges, celui d’Edmond Thiébault, officier d’ordonnance de Ricciotti et enfin, celui, récent, d’un historien, Robert Molis.                             

Voici d’abord ce que dit Ricciotti [ii]                                                            

« Dans ce but, je décidai l’exécution d’un mouvement vers le Nord, c’est-à-dire sur le front des avant-gardes ennemies.

Le 11 janvier, la quatrième brigade prend la route de Darcey.

Dans cette localité nous recevons la nouvelle qu’une colonne fourragère est en train de prélever des vivres à Baigneux-les-Juifs.

Tout de suite, je fais accélérer la marche et, en arrivant près de Villeneuve, deux compagnies, sous les ordres de Michard, sont poussées jusqu’à Villaines, avec l’ordre de prendre la route qui, de cet endroit, conduisait à Baigneux et de tailler ainsi la retraite aux Prussiens.

En attendant, la brigade continuait sa route vers Baigneux.

Arrivés à moins d’un kilomètre de cette localité, nous rencontrons une patrouille de cavalerie qui, attaquée par nos guides, est aussitôt obligée de tourner bride.

La route, passant au milieu d’une bande de terrain ouvert, avec des bois à droite et à gauche, coupait à angle droit la crête de la colline et descendait ensuite de l’autre côté sur le  village.

Cette crête était fortement occupée par les Prussiens qui reçurent nos tirailleurs par une très vive fusillade.

Je fis avancer deux compagnies par l’extrémité du bois à droite, de manière à tourner la position de l’ennemi et pour l’obliger à se retirer par la route de Villaines.

La manœuvre réussit parfaitement.

L’ennemi, chassé de l’arête de la colline, se retira sur le village.

Mais après un bref combat, il fut obligé d’abandonner aussi celui-ci et il recula dans la direction de Villaines en grand désordre, laissant entre nos mains douze prisonniers et trois voitures de subsistances.

Le malheur voulut que Michard, retardé dans sa marche, ne fût pas encore arrivé à ce village, sinon les Prussiens, pris entre deux feux, seraient  probablement tous restés prisonniers.

Ayant suspendu toute poursuite, nous sommes retournés à Baigneux, où nous avons trouvé un hôtel plutôt convenable.

A notre demande s’il y avait quelque chose à manger, l’hôte répondit en souriant que le repas était prêt.

Tant de chance nous surprenait.

Nous étions si peu accoutumés à trouver les repas tout prêts !

Mais l’hôte nous avoua que celui-ci avait été commandé par les officiers prussiens que nous avions chassés de là.

Nous nous arrêtâmes dans ce village pour le restant de la journée, mais en prenant la précaution de bien nous couvrir par des postes avancés.

Cependant, l’arrivée de quelque gros corps ennemi était probable et, dès le lendemain matin, à une heure après minuit, nous nous mettions en marche pour Aignay-le-Duc.

Nos prévisions étaient justes : à six heures du matin, dans le village que nous venions d’abandonner, arrivaient deux mille Prussiens avec de la cavalerie et de l’artillerie, et selon leur habitude, ils mirent le pays sens dessus-dessous »[iii].

Voici ensuite le récit d’Edmond Thiébault, franc-tireur de la quatrième brigade [iv] :                      

« La journée du 10 janvier est consacrée à des reconnaissances, on observe l’ennemi.

A Châtillon-sur-Seine, les forces prussiennes augmentent chaque jour dans d’inquiétantes proportions.

Deux colonnes, fortes de plusieurs milliers d’hommes, occupent : l’une Villaines, l’autre Saint-Marc.

Elles s’étendent jusqu’à Baigneux, Aignay-le-Duc, Montmoyen, Recey ; partout de fortes réquisitions.

La nuit dernière, un fort détachement a fait une démonstration vers Sainte-Reine, où nos éclaireurs l’ont rencontré.

Dans l’après-midi, le colonel Lobbia vient se mettre en communication avec nous, il nous apporte enfin quelques renseignements ; une marche est décidée pour le lendemain.

Le 11 dans la matinée, la brigade, abandonnant la grande route, s’engage par des chemins impossibles dans la direction de Darcey.

Le froid est devenu excessif, nous éprouvons les plus grandes difficultés à faire avancer nos voitures, les cavaliers eux-mêmes marchent avec peine sur les voies glacées.

Quand nous arrivons à Darcey, nous rencontrons les éclaireurs de la 2e brigade qui nous signalent la présence de l’ennemi à Baigneux-les-Juifs.

Un peu plus loin, les francs-tireurs Basques nous confirment ces renseignements ; les Prussiens viennent prendre possession des réquisitions qu’ils ont exigées la veille par un ordre de la municipalité.

La colonne a repris sa marche dans la direction signalée.

Quand elle arrive près du bois, au-dessus de Villeneuve, le colonel Ricciotti détache les deux compagnies de Savoie et les lance sur la gauche.

Elles ont l’ordre de s’avancer jusqu’à la route qui conduit à Villaines et marcher ensuite sur Baigneux.

Pendant ce temps, le reste de la brigade continue son mouvement.

 A peine arrivés en vue du village, nous distinguons les éclaireurs prussiens qui, faisant volte-face à notre vue, s’élancent au galop donner l’alarme ; on peut voir bientôt l’infanterie ennemie rangée en bataille sur la droite de Baigneux.

Les compagnies sont immédiatement déployées dans la plaine couverte de neige.

Les tirailleurs s’avancent sur deux lignes ; leur vaste développement permet d’envelopper tout le village.

La fusillade commence par la droite dont le rapide mouvement doit rejeter les Prussiens sur les deux compagnies envoyées du côté de Villaines, leur arrivée est imminente.

Cette manœuvre tournante devait pleinement réussir sans la promptitude obligée de l’attaque de la gauche qui, venant malheureusement couper la route à l’ennemi, le force à abandonner la position.

Il se rejette alors derrière le village, se ménageant ainsi une retraite vers le bois qu’on aperçoit au bas de la route.

Nos francs-tireurs avancent rapidement sous une vive fusillade, ils occupent successivement les maisons et les jardins que les Allemands sont impuissants à défendre ; ils sont bientôt maîtres du coteau qui domine le pays, dernière position que l’ennemi abandonne pour se retirer dans le plus grand désordre dans la direction d’Ampilly-le-Haut [v].

 La lutte avait duré une heure à peine.

Les Prussiens laissaient entre nos mains 12 prisonniers et 3 voitures de vivres ; leurs pertes sont restées inconnues, elles devaient être sérieuses.

De notre côté, nous avions 1 mort et 4 blessés.

La brigade passe à Baigneux le reste de la journée sous la protection de grand’gardes sérieuses [vi].

Les prisonniers sont immédiatement conduits au colonel Lobbia qui doit occuper Billy-les-Chanceaux et Poiseul-la-Grande ; il devra les faire accompagner au quartier-général [vii].

Le 12 janvier à 3 heures du matin, nous reprenons notre marche vers Aignay-le-Duc ».

Enfin, selon Robert Molis [viii] :                                                                                       « Selon le capitaine des Francs-Tireurs de l’Aveyron, c’est vers 2 heures après-midi que la Brigade trouva 200 ou 300 Prussiens au village de Baigneux.

On commence à investir le village ; les Francs-Tireurs de « La Croix » (de Nice) appuient, à gauche, les Compagnies réunies de l’Aveyron et de l’Allier, tandis que la « Compagnie des Vosges » s’avance par la droite.

Malheureusement, trois Uhlans, « faisant preuve d’une audace extraordinaire », se dirigent, au petit pas, vers le Colonel, lequel, croyant qu’ils venaient dire que la troupe se rendait, donne ordre de cesser la progression et de ne pas tirer.

Quand Ricciotti revint de son erreur, il en commit une seconde en faisant courir sus aux Prussiens en formation de tirailleurs et non pas en colonne, « ce qui aurait permis d’arriver beaucoup plus vite »[ix].

Bilan de la prise de Baigneux-les-Juifs : « quelques pertes », une voiture de réquisition prise, ainsi que, capturés par les Francs-Tireurs de l’Aveyron, 12 prisonniers dont un chirurgien. La plupart de ces Prussiens furent capturés par le Franc-Tireur Fabre et par le caporal Labro.

Selon les Béarnais, ils n’étaient que 40 Francs-Tireurs, partis pour intercepter 80 cavaliers, qui virent déboucher 20 cavaliers et 200 fantassins.

Ils firent le coup de feu eux-aussi, la colonne des Francs-Tireurs les ayant « débloqués ». Selon eux, les Prussiens eurent 2 tués, 9 blessés et 11 prisonniers ». 

Mais, toujours selon Robert Molis, il y eut un désaccord entre les Francs-Tireurs :

« le 11 janvier, ayant appris qu’une colonne réquisitionnaire venant de Jours et de Baigneux doit passer par là, les francs-tireurs du Béarn vont se poster sur la route entre La-Villeneuve-les-Convers et Baigneux-les-Juifs.

Le renseignement était bon : 120 ou 150 Allemands se présentent en effet… aux yeux des Francs-Tireurs en même temps que débouche Ricciotti Garibaldi avec un millier d’hommes, venant de Flavigny et Darcey.

Qui aura l’honneur d’ouvrir le feu ?

Les Francs-Tireurs du Béarn, dit leur capitaine, prièrent Ricciotti de suspendre sa marche pour laisser les Prussiens arriver sur leur embuscade.

Ricciotti refuse et le capitaine Grison note qu’il « juge plus utile de marcher sur Baigneux qu’il enlève, mais l’ennemi a le temps de fuir ».

 

[i] Bordone (général) : « Garibaldi et l’armée des Vosges ; récit officiel de la campagne » ; Paris, 1871

[ii] Ricciotti Garibaldi : « souvenirs de la campagne de 1870-71 », traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

[iii] Selon l’instituteur Pierre Genevoix ; il écrivit, en 1888, que « le 11 janvier1871, un petit détachement prussien escortant une voiture de réquisition fut attaqué à Baigneux par les francs-tireurs garibaldiens. Ce détachement put prendre la fuite… ;  « Cahiers du Châtillonnais ; monographie de la commune de Baigneux-les-Juifs », n° 2

[iv] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4eme brigade, récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

[v] « Les tirailleurs, sous un feu de mousqueterie très vif, continuèrent à avancer ; ils occupèrent d’abord le village, puis un petit château qui est sur la lisière du bois » ; Bordone, op. cit.

[vi] Même signification qu’avant-poste

[vii] Le 12, les prisonniers arrivèrent à Dijon et entrèrent dans la cour de la préfecture ; Thiébault, op. cit.

[viii] Molis Robert : « les Francs-Tireurs et les Garibaldi » ; Editions Tirésias, 1995

[ix] Selon Léon Rodat, capitaine des francs-tireurs de l’Aveyron, cité par Robert Molis, op. cit.

 

"La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 3 : acte de décès de Claude Carteau état-civil de Baigneux

Deux francs-tireurs furent blessés et soignés par les sœurs pendant plusieurs semaines ;  le caporal Lacan, franc-tireur de l’Aveyron, « eut les deux cuisses traversées par une balle », mais il put par la suite repartir chez lui [i] ; par contre, Claude Carteau, franc-tireur du Doubs, lui aussi blessé, s’éteindra le 30 janvier 1871et sera inhumé au cimetière de Baigneux.

Le lendemain, 12 janvier, les prussiens revenaient en force à Baigneux et ce fut le pillage.

Pendant deux heures, les soldats allemands, pénétrant dans les maisons, se faisaient ouvrir les armoires et les caves et emportaient tout ce qui était à leur convenance.

Aucune résistance ne se produisit de la part des habitants ; les objets pillés furent surtout des denrées de consommation et du linge.

Le maire, M. Lombard, assez malmené, fut un certain temps gardé àvue à cent mètres du village et menacé de mort.

Des canons, braqués sur les hauteurs, lancèrent quelques boulets dans la direction de Poiseul-la-Ville, afin d’attirer les francs-tireurs qui occupaient cette localité, pendant que des masses prussiennes importantes étaient cachées dans les bois voisins ; heureusement les francs-tireurs ne donnèrent pas dans le piège et Baigneux fut sauvé [ii].

Pendant ce temps, Les Francs-Tireurs de la IIe brigade de Lobbia se sont mis en marche pour arrêter l’ennemi ; les Francs-Tireurs Républicains de Bigorre sont envoyés se poster, avec les Éclaireurs, à Courceaux, tandis que les Chasseurs d’Orient et les Francs-Tireurs Marins vont occuper Poiseul-la-Ville, et, en arrière, à Chanceaux, sont postés le Bataillon de l’Égalité et la Compagnie du Génie.

Quant à Ricciotti, il arrivait à Aignay :                                                            

« La route conduisant à Aignay était tout simplement infâme ; cette marche pénible sur une route impraticable, coupée encore de fréquents arrêts occasionnés par des alarmes, firent que notre arrivée à Aignay n’eut lieu que le soir à 9 heures ».   

 C’est le maire d’Aignay, M. Misset, qui les accueillit [iii]:

« Les Francs-Tireurs sont arrivés à Aignay le 12 janvier 1871 à 6 h du matin.

Ils étaient au nombre de 1 200, commandés par Ricciotti ; ils avaient 104 chevaux et venaient du canton de Baigneux.

Leurs bagages étaient conduits par quelques cultivateurs des environs de Tonnerre, absents de leur pays depuis une douzaine de jours.

Ils furent remplacés par 6 voitures et 18 chevaux d’Aignay chargés de conduire à Dijon les munitions de la Brigade.

Nos hommes ont été absents six jours, sans toucher de rétribution.

Ce corps a été bien accueilli par les habitants chez lesquels les soldats se logèrent à leur fantaisie.

La plupart des compagnies étaient composées d’hommes assez convenables, mais il y en avait parmi eux un certain nombre, 30 ou 40 , mauvais sujets, indisciplinés, insolents même pour leurs chefs, et dont le Chef d’état-major désirait vivement être débarrassé.

Nous n’avons remarqué dans cette troupe que 50 ou 60 Italiens portant la chemise rouge ; la plupart étaient des ivrognes.

J’avais chez moi, avec Ricciotti, ses Officiers intimes ; son secrétaire, faisant fonction de Chef d’état-major, était un M. Thiébault, connu à Dijon, homme de bonnes façons, maintenant le plus possible l’ordre et la discipline… »                     

   Ricciotti poursuit :

« Ce village est situé au fond d‘un trou, c’est donc une très mauvaise position à tenir, et qui nécessite des lignes très étendues d’avant-postes et de nombreuses patrouilles.

Pendant la nuit j’organisai, au moyen d’habitants qui m’avaient offert leurs services, un bon service d’informations avec les localités voisines

(voici ce qu’en dit Edmond Thiébault :

« Dans la nuit, nos éclaireurs se sont mis en communication avec les maires des villages qui nous entourent au loin.

Ces fonctionnaires ont eux-mêmes envoyé d’autres éclaireurs plus en avant, et nous transmettent des notes qui nous confirment les différentes positions de l’ennemi et ses mouvements »).

Ainsi j’appris qu’une forte colonne prussienne occupait Villaines ; une autre, Saint-Marc et une troisième, Saint-Broing-les-Roches.

Un détachement fort de 5 000 hommes occupait Grancey ; un autre, plus fort, marchait sur Auberive.

De sorte que notre position était des plus précaires…                                             

Arrivés à Aignay… au soir, je voulus moi-même placer nos avant-postes, ce qui n’était point facile en pleine obscurité.

Puis, retourné au quartier-général, je reçus les rapports ; je donnai des instructions aux commandants de compagnies ; j’organisai avec lesautorités locales le service d’informations civiles, enfin je pris un peu de nourriture ; tout cela nous mena jusqu’à minuit…

Je m’endormis et, à 3 heures, l’officier de service me réveilla pour faire la ronde habituelle aux avant-postes-opération nécessaire, parce que c’est généralement à l’aube que se produisent les surprises, et à ce moment surtout il faut être bien sûr que tout est en ordre.

A ma très grande surprise, je constatai que tout mon système d’avant-postes, que j’avais organisé avec tant de soins dans la soirée, était radicalement changé.

Avec la rigide discipline qu’il fallait, surtout en service, cela me préoccupait.

Aussi, dès le retour au quartier-général, fis-je appeler quelques commandants de compagnie pour leur demander la raison deces changements.

Ils se montrèrent, eux, plus surpris encore que moi.

L’un d’eux, Rostaing, me dit que, pendant la nuit, des patrouilles ennemies s’étaient approchées, ils vinrent pour me demander ce qu’il fallait faire, et que j’avais alors consulté ma carte, puis donné des ordres précis à ce propos.

Je restai stupéfait à cette nouvelle complication, lorsque Arnaud, des savoyards, me dit, en riant :

« Je m’en doutais déjà, commandant, mais maintenant j’en suis certain ; nous sommes venus effectivement vous faire nos rapports et vous nous avez donné les ordres nécessaires, mais, tout cela, vous l’avez fait en dormant ».

Par cette pointe jusqu’à Aignay, nous avions traversé tout le front de l’armée de Manteuffel.

Maintenant, il s’agissait de se retirer en maintenant toujours le contact avec cette armée.

Dans ce but, le lendemain, nous nous repliâmes vers le Sud et, le soir, nous arrivions à Avot-le-Grand [iv].

Une autre étape nous amenait à Is-sur-Tille ».

 

[i] Selon Robert Molis, il fut laissé dans une maison de Baigneux

[ii] Genevoix Pierre ; op. cit.

[iii] Lettre de M. Misset, du 15 juin 1872, à la « Commission d’Enquête » ; cité par Robert Molis, op. cit.

[iv] En passant par Etalante, Salives et Barjon ; Bordone, op. cit.

 

"La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 4 :première ligne d'avancée des garibaldiens, du 10 au 16 janvier, au nord-ouest de Château-Chinon à Langres; deuxième ligne autour de Dijon, le 20 janvier (Bordone, opus cité)

Le 16,  Ricciotti et la quatrième brigade se repliaient à Dijon, où Giuseppe Garibaldi se trouvait depuis le 7 janvier, ayant quitté Autun par chemin de fer [i].

Pendant cette même période, à Châtillon, le 12 janvier au soir, arrivait le général Manteuffel, qui avait pris le 11, à Versailles, ses instructions auprès du grand état-major.

Là, il opéra sa jonction avec les généraux von Zastrow et Fransecki [ii], pour se porter au secours du général von Werder, qui était autour de Dijon et essayait de couper la retraite au général Bourbaki [iii].

Si le point de concentration choisi par von Moltke fut Châtillon, c’est parce qu’il en connaissait l’importance stratégique ; Châtillon avait en effet le double avantage de se relier par des voies ferrées à Chaumont, à Troyes, à Nuits-sous-Ravières, sur la ligne de Paris à Lyon, et d’être comme une position centrale en avant des défilés de la Côte d’Or.

C’est là que les forces de l’armée du sud se réunirent, à l’entrée des vallées profondes de l’Aujon, de l’Aube, de l’Ource et de la Seine, dans les sinuosités desquelles s’enfoncent, à des intervalles de 10 à 15 kilomètres, quatre routes montueuses qui, par des rampes escarpées, conduisent aux hauts plateaux entre Langres et Dijon [iv]. Ces généraux repartirent le 14.                                                                                                                                                Le 21 janvier commençait la troisième bataille de Dijon.

[i] Le général von Moltke, conscient du danger que représente l’armée de l’Est, avait fait évacuer Dijon le 27 décembre pour organiser une ligne de défense à l’ouest de Belfort

[ii]Selon Léon Legey (« Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon » ; Châtillon, 1899), Manteuffel trouva à Châtillon von Zastrow et von Hosten-Iaken  ; selon P.A Dormoy, Manteuffel trouva à Châtillon le 7e corps d’armée de Zastrow et le 2e corps d’armée, de Fransecki ; celui-ci passa par Nuits, Montbard, Chanceaux et Is-sur-Tille, tandis que Zastrow partit en direction de Langres, par Recey, Auberive et Prauthoy (« Guerre de 1870-71 ; les trois batailles de Dijon, 30 octobre, 26 novembre, 21 janvier » ; Paris, 1894)

[iii] Les Prussiens s’attendaient à être attaqués le lendemain et avaient averti le maire de Châtillon de prendre ses précautions ; dans les jours suivants, des barricades furent élevées ; le général von Moltke avait créé une armée du sud, confiée au général von Manteuffel, pour contrer l’armée du général Bourbaki

[iv] Revue des Deux Mondes ; 1872, tome 102, p. 786

 

"La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

Figure 5 : les mouvements des troupes françaises et prussiennes autour de Dijon; "La guerre de  70" François Roth, Paris

(Dominique Masson)

 

 

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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Publié le 31 Décembre 2020

Voici un notule d’histoire de Dominique Masson, historien du Châtillonnais , sur un épisode peu connu qui s'est passé à Châtillon sur Seine en décembre 1870.

Merci à lui de nous éclairer avec tant de précision sur cette exécution de Léon Vigneron par les Prussiens, exaspérés par l'attaque contre eux, des francs-tireurs de Riciotti Garibaldi.


L’exécution de Léon Vigneron, le 19 décembre 1870

Le 19 juillet 1870, l’empire français, dirigé par Napoléon III, entrait en guerre contre la Prusse de Guillaume Ier et ses alliés allemands.

Après la défaite française à Sedan et l’abdication de l’empereur français, la troisième République fut proclamée deux jours après, le 4 septembre, mais la guerre va continuer.

Giuseppe Garibaldi, avec ses fils, vint se mettre au service de la jeune République et rejoignit Tours, siège de la délégation gouvernementale hors de Paris assiégé.

Gambetta lui confie alors le commandement de tous les corps francs de la zone des Vosges, de Strasbourg à Paris. Ces francs-tireurs sont des corps de volontaires, plus ou moins organisés et plus ou moins importants, qui se lèvent contre les troupes prussiennes et qui combattent parallèlement à l’armée régulière.

Le 31 juillet 1870, une circulaire ministérielle française admit le principe de compagnies de francs-tireurs, engagées pour la durée de la guerre.

Mais, du côté prussien, on juge qu’ils font une guerre déloyale, organisant des embuscades, des surprises ou des coups de main, et ces attaques inquiètent l’état-major.

Aussi le commandement prussien leur refusera toujours la qualité de belligérant : Tout franc-tireur sera assimilé à un malfaiteur ; il sera passible du conseil de guerre immédiat qui peut prononcer la peine de mort.

S’il est établi que dans un village un tireur non identifié a attaqué des soldats, celui-ci sera déclaré responsable et subira des représailles

.
Le 19 novembre 1870, Ricciotti Garibaldi, avec les francs-tireurs de Dôle, des Vosges et du Dauphiné, ainsi que les chasseurs du Havre et de Savoie et le bataillon Nicolaï, opéraient une surprise à Châtillon, tuant neuf prussiens, et surtout récupéraient des armes, la caisse du régiment et des chevaux .

Mais les francs-tireurs n’étaient pas assez nombreux pour occuper la ville et l’évacuèrent le soir.

Les prussiens prirent une quarantaine d’otages et les emmenèrent sur la route de Langres, où ils passèrent la nuit, avant d’être peu à peu libérés.

Mais six otages, dont le maire, furent emmenés à Châteauvillain.

Le 22, les prussiens revinrent en force à Châtillon, pillèrent la ville et imposèrent une contribution financière.

C’est dans ce contexte qu’arriva l’exécution de Léon Vigneron.

On a beaucoup dit sur lui, mais certains points sont à corriger.


Edme Vigneron est né le 13 avril 1834, à Marac, en Haute-Marne, fils de Pierre Vigneron, pâtre, et de  Nicole Garnier ; son acte de naissance ne porte qu’un seul prénom, celui d’Edme, et on ne sait pourquoi il fut appelé par la suite Léon.

Il se maria le 22 février 1857 avec Eugénie Gachet, à Neuilly-sur-Suize ; il est à ce moment déclaré habiter à Neuilly et est déclaré «  domestique » et il signe : Léon Vigneron.

Achille Maitre écrira, en 1870, qu’il « n’était marié que depuis quelques jours » .    

Il revint habiter à Marac ensuite, mais on ne sait quand, et il ne semble pas avoir eu de descendance.

 

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 1 : signature de "Léon"Vigneron sur son acte de mariage en 1857 et de sa femme

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 2 :Acte de naissance d'"Edme" Vigneron, état-civil de Marac (52)

Suivons maintenant le récit fait par Gaudelette [i] 

Le jeudi 11 décembre 1870, des troupes de la garnison de Langres étaient sorties pour essayer de surprendre un fort détachement de Prussiens qui se trouvait à Châteauvillain, mais l’ennemi ayant été averti, la tentative échoua, et les troupes rentraient deux jours après à Langres, laissant deux compagnies à Marac et deux autres compagnies dans un village voisin.

Le dimanche 14, on signala les Prussiens, au nombre de 3 à 4 000, à peu de distance du village.

Aussitôt les deux compagnies, auxquelles s’étaient joints quelques gardes nationaux de la localité, se déploient en tirailleurs dans les jardins, font une vigoureuse résistance ; mais, n’étant pas en nombre, ils durent se replier sur Langres.                                                             

Louis Vigneron ne se trouvait pas en ce moment au village ; il était dans un moulin situé à un kilomètre de là, où il s’occupait tranquillement des soins du moulin où il était simple domestique.

Il apprend tout à coup que l’ennemi est à Marac, qu’on lui oppose de la résistance ; alors, n’écoutant que son ardent patriotisme, faisant taire ses sentiments de père et d’époux, il n’hésite pas un instant ; il prend un fusil de chasse chez son maître, court à Marac, se met en embuscade derrière un mur de jardin et, sans s’occuper de ce qui peut advenir, décharge ses deux coups de fusil sur des Prussiens qui passaient à distance.

Aussitôt il est poursuivi par les uhlans qui, après quelques minutes, s’en emparent.

Dans sa fureur, l’ennemi pille les premières maisons du village et s’empare des notables qui sont emmenés à Arc-en-Barrois.                                                                                         

Quant à Louis Vigneron, il fut emmené à Châtillon avec d’autres prisonniers.

Accusé d’avoir protégé les francs-tireurs et d’avoir agi de complot avec eux, quoique cela n’ait pas été prouvé, il fut condamné sommairement à être fusillé.

                                                                    Gaudelette l’appelle Louis, alors que son prénom est Edme, et, plus tard, il sera gravé qu’il se prénommait Léon.

Par contre, Gaudelette dit bien qu’il n’était que domestique au moulin de Marac.

Mais, comme il fut pris au moulin, le commandant en chef prussien le qualifia de « meunier », et c’est aussi ce qui sera gravé par la suite.        

 

[i] Gaudelette Michel : histoire de la guerre de 1870 en Bourgogne ; Paris, 1895

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 3 : condamnation de Vigneron par Von Delitz (archives Municipales Châtillon sur Seine)

Léon Vigneron fut emmené à Châtillon et enfermé dans la même prison que les dix habitants de Thoires arrêtés le 14 décembre ; ce sont eux qui eurent la douleur de lui donner la dernière accolade[i].

 On possède deux récits concernant ses derniers moments, à la maison d’arrêt.

Voici celui relaté par son directeur, M. Jamet :

J’avais arboré le drapeau de la convention de Genève pour protéger et faire respecter la maison ; cela fut inutile.

Les prussiens au nombre de 180 envahirent et prirent possession de l’établissement sans autre préoccupation…..

Quelques jours après cette prise de possession les allemands amenèrent maire et notables des environ pris en otages et m’enjoignirent de les nourrir … j’ai répondu au chef que n’avais pas assez de provision.

Il me répondit par un effroyable coup de poing qui me renversa et au même moment ma femme qui faisait la même réflexion fut frappée violemment d’un coup de la crosse de fusil sur la poitrine…

Le 21 décembre[ii]à 7 heures du matin on m’intima l’ordre d’aller chercher un nommé Léon Vigneron qui avait été arrêté le 30 novembre[iii]

Le malheureux avait été accusé d’avoir tiré sur eux.

J’allai le chercher dans la salle des passagers ou il couchait et l’emmenai chez moi où on lui lut sa sentence de mort et un quart d’heure plus tard il n’était plus…[iv] .

En 1872, Emile Montégut [v] recueillit le témoignage de la femme du directeur :

Les Prussiens l’accusaient d’avoir protégé les francs-tireurs et d’avoir agi de complot avec eux, quoique cela n’ait pas été prouvé.

C’est celui-là qu’ils choisirent pour se venger.

J’entends encore, j’entendrai toujours, je crois, le cri que poussa ce malheureux lorsqu’on lui annonça qu’il allait être fusillé.

Il demanda qu’on lui laissa le temps d’écrire au moins à sa femme, ce qui lui fut accordé avec beaucoup de difficulté.

Il écrivait tout en tremblant, comme vous pouvez le croire, en sorte que cela ne marchait pas bien vite ; alors un officier s’avança et lui dit brusquement :

« Un mot, rien qu’un mot, vous m’entendez bien, et dépêchons-nous, nous avons autre chose à faire qu’à vous expédier ».

Puis ils l’ont amené contre le mur du cimetière et ils l’ont fusillé.

Gaudelette ajoute :

Puis il écouta les exhortations de l’abbé Lecœur, aumônier de l’hospice, fut aussitôt amené contre le mur du cimetière et fusillé.

Il se trouva dans le peloton d’exécution des soldats qui ne voulurent pas prêter les mains à cet acte odieux ; leurs balles furent ramassées le lendemain au pied du mur, contre lequel elles s’étaient aplaties, dans un rayon assez éloigné. 

Et madame Jamet poursuit :

Il a été enterré à cette place même où il est tombé, avec les habits qu’il portait, sans qu’on ait pu le mettre dans une bière.

En fait, selon Gaudelette :

le corps de Vigneron fut ensuite littéralement traîné dans la neige jusqu’à l’entrée du cimetière.

Comme aucune fosse n’avait été préparée, on le recouvrit seulement de quelques pelletées de terre, avec défense expresse de toucher au corps.

Quelques jours après, en raison de la mauvaise odeur répandue par le cadavre, la municipalité obtint l’autorisation de le faire disparaître sous un monticule de terre

 Il dut être enterré au cimetière Saint-Vorles mais, le 23 novembre 1876, il fut exhumé et ses restes transférés au cimetière Saint-Jean pour y être enterrés avec ceux des francs-tireurs tués lors de l’attaque garibaldienne [vi].                                                                                                                       A l’endroit où Léon Vigneron fut fusillé, M. des Etangs, membre du conseil municipal et président du tribunal civil de première instance, fit ériger une croix en pierre, sur laquelle on peut lire une inscription qu’il rédigea lui-même :

            A Léon Vigneron/sa/veuve                                                                                                                                                                                                                   Garde Nata lpris à Marac le 11 /  X bre 1870 fusillé ici / le 19 par les prussiens il est /mort en chrétien et pour la /patrie                                                                                                                                                      

 Que Dieu / préserve / à jamais / la France / de frapper /le vaincu / désarmé et / de punir le / patriotisme comme un / crime[vii]

 En 1915, lors d’une manifestation patriotique organisée par le Souvenir Français et les blessés valides des hôpitaux, des palmes furent posées sur cette croix. Ce n’est que par la suite qu’une balustrade fut ajoutée, lui donnant l’apparence d’une tombe.

 [i] Lors de l’attaque de Châtillon par les Garibaldiens, plusieurs prussiens affolés s’enfuirent au hasard dans la campagne ; trois se laissèrent capturer par les habitants de Thoires ; le 14 décembre, le village fut cerné par un détachement prussien qui les récupéra et emmena en retour dix habitants de Thoires comme prisonniers, à Châtillon ; Diey Michel : 1870-1871, la guerre oubliée dans le Châtillonnais, Cahiers du Châtillonnais, n° 151

[ii] Erreur de date ; de même pour l’horaire

[iii] Von Delitz, dans sa pancarte, indique 6h 1/2 ; Achille Maitre écrit : « Le 19 décembre, à 6 heures ½ du matin, on entendait un feu de peloton du côté du cimetière de Saint-Vorles ».

[iv] M le préfet, 1er Août : « M. le gardien chef de la maison d’arrêt de Châtillon sur Seine vient de m’adresser, que j’ai l’honneur de vous transmettre, son rapport au sujet des faits qui se sont passés dans son établissement sous l’occupation prussienne, des dégâts de toute nature qui y ont été commis et des exactions….dont il a été témoin personnellement ainsi que sa famille. M. l’architecte du département a visité l’établissement depuis son évacuation…. J’ai eu l’honneur de vous adresser ainsi qu’à M. le ministre de l’intérieur des propositions pour qu’il fût alloué au directeur de la maison d’arrêt une indemnité de 200 francs en raison des pertes et mauvais traitements qu’il a subis…. Je vous prie d’agréer monsieur le préfet l’assurance de mon respect » ; signé le directeur.

[v] Montégut Emile : Impressions de voyage et d’art, souvenirs de Bourgogne ; in « Revue des deux mondes », premier mars 1872

[vi] Diey Michel : chronique : à propos de la tombe de Léon Vigneron, Cahiers du Châtillonnais, 2004, n°189 

[vii] «… sa veuve… » : ces mots sont souvent oubliés dans les livres rapportant cette inscription

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 4 : le "monument" de Léon Vigneron, carte postale Parisot

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 5 : le "monument" de Léon Vigneron, cliché Dominique Masson

Le peintre Victor Didier, en 1882, raviva le souvenir de cette exécution en faisant une peinture représentant l’exécution de Vigneron [i].

Sur ce tableau, les soldats prussiens attendent un peu plus loin que la sentence soit lue et on distingue au loin un mur.

 [i] Victor Didier (1837-1889), est un peintre châtillonnais ; il fut professeur de dessin au lycée de Châtillon

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 6 : Reproduction du tableau de Victor Didier, photo-carte

Mais il semble que, la même année,  ce même peintre fit un deuxième tableau, avec des variantes par rapport au premier ; il rajouta l’abbé Lecœur, à genoux, et disposa différemment le peloton d’exécution ; celui-ci est face à Vigneron et un officier se tient devant, prêt à sortir son sabre pour commander le feu [i].

C’est cette version que reprit, en carte postale, l’éditeur châtillonnais H.Bogureau.

 [i] Ces deux tableaux semblent avoir disparu

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 7 : Dessin de L.Breuil dans l'ouvrage de Gaudelette

Ceci permit également, par l’intermédiaire des cartes postales, d’entretenir un certain patriotisme.

"L'execution de Leon Vigneron

Ce tableau de l’exécution de Vigneron fut repris dans le livre de Gaudelette, paru en 1895 ; L.Breuil en fit un dessin,à partir du tableau de Victor Didier, en modifiant un peu l’arbre derrière Vigneron et en ajoutant au fond un hangar.

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 8 : L'exécution de Léon Vigneron, carte postale , H.Bogureau

Si Vigneron avait été fusillé à Châtillon, son décès ne fut pas porté sur les registres de l’état-civil.

Le maire de la commune de Marac, au nom de la veuve de Vigneron, intervint, tendant à obtenir un jugement auprès du tribunal de Châtillon, pour suppléer à l’acte de décès de son mari qui n’a pas été rédigé.

Après audition des témoins, le tribunal, le 25 avril 1871, constata qu’il fallait réparer cette omission ; le jugement rendu indiqua qu’il tenait lieu de l’acte de décès qui n’a pu être dressé en raison des circonstances, et qu’il serait transcrit dans les registres de l’état-civil de l’année courante ; le maire s’exécuta le 4 mai 1871 ; l’acte porte le numéro 93.

"L'execution de Leon Vigneron

Figure 10 : jugement inséré dans les actes de l'état-civil de la Commune de Châtillon sur Seine (1871)

Dominique Masson

(remerciements à MM. Massé et Millot)

 

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Rédigé par Christaldesaintmarc

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