"Etienne-Jean Bouchu , un maître de forges au temps des Lumières", une conférence proposée par les Amis du Musée du Pays Châtillonnais-Trésor de Vix
Vendredi 16 octobre à 20h30, salle de conférences du Musée du Pays Châtillonnais-Trésor de Vix, a eu lieu une très intéressante conférence sur un personnage peu connu :
Etienne-Jean Bouchu , un maître de forges au temps des Lumières
présentée par Dominique Masson, Président des Amis du Châtillonnais
Dominique Masson a évoqué un personnage secret, mais intéressant, qui a participé à la rédaction de l’Encyclopédie sous la direction de Diderot et qui a rédigé le plus important traité de métallurgie écrit en France au XVIIIe siècle. C’était un de ces hommes vivant au plus près de la mine et des forges, qui firent avancer les techniques métallurgiques en un temps où la chimie était à ses premiers balbutiements et ne pouvait encore percer les mystères du haut fourneau.
Avant de nous parler d'Etienne-Jean Bouchu, Dominique Masson nous a présenté les lieux où existaient des forges, il y a deux siècles, dans le Châtillonnais et dans le Barrois.
Une carte postale amusante...
nous montre que le Châtillonnais était riche en forges...
Des gisements de minerai de fer, et la présence de la forêt et de son bois, expliquent cette abondance de forges.
Dominique Masson nous présenta ensuite Etienne-Jean Bouchu, dont on n'a aucun portrait, seulement des textes manuscrits et sa signature.
Étienne Jean Bouchu naquit à Langres le 23 mai 1714 de Pierre Bouchu, conseiller avocat du roi au siège présidial de cette ville, et de Jeanne de Goix, probablement de la famille des de Goix de Vauclair.
Il épousa Nicole Becquet, fille de maître de forges d’Arc-en-Barrois.
Il se fixa alors à Arc en Barrois et devint lui-même maître de forges.
Il afferma d'abord le haut-fourneau de Veuxhaulles et y habita.
Il loua également d'autres fourneaux et, à le fin de sa vie, habita Arc où il s'occupait du haut-fourneau.
Il fit de nombreuses expériences sur le fer et analysa un grand nombre de minerais de fer en provenance de toute l’Europe.
Il se distingua dans les sciences naturelles et se créa de nombreux amis parmi les savants, comme par exemple Diderot.
Il fut l’auteur de plusieurs articles de l’Encyclopédie sur la fabrication du fer, mais n'en signa qu'un seul sur "les grandes forges"..
Il était en relation avec les philosophes de l’Encyclopédie, et fut membre de l’Académie de Dijon et correspondant de l’Académie des Sciences de Paris.
Monsieur Grignon écrivit "Les mémoires de physique sur l'art de fabriquer le fer", mais Bouchu n'y participa pas..
Abel Caroillon de Vandeul était le gendre de Diderot. C'est l'article de Bouchu qui le poussa à se lancer dans le métier de maître de forges. Il acheta l'abbaye d'Auberive pour exercer son métier.
Etienne-Jean Bouchu publia, avec le Marquis de Courtivron, un important ouvrage sur le fer : " Descriptions des arts et métiers, faites ou approuvées par Messieurs de l'Académie royale des sciences de Paris" 1771-1783.
Etienne-Jean Bouchu, à force d'études et d'expériences sur les forges, avait découvert un secret de la fabrication du fer...mais il l'emporta, hélas, dans sa tombe, ne l'ayant même pas révélé à son épouse.
C'est probablement Etienne-Jean Bouchu qui fit construire une belle maison à Arc en Barrois....
La voici actuellement.
François Poillotte a rédigé une étude passionnante sur l'abbaye de Longuay. Dans son ouvrage, il cite le petit-fils de Bouchu, Paul-Marie Victor, fils de Thomas. Ce dernier acheta, avec sa mère, l'ancienne abbaye de Longuay pour exploiter la forge, et c'est lui qui transforma une partie de l'abbaye en château.
Dominique Masson a donc retrouvé grâce aux recherches de François Poillotte, la trace de la présence de cette famille.
Cette forge a, hélas, complétement disparu.
Plus tard, beaucoup de maîtres de forges du Châtillonnais se réunirent pour former les forges de Châtillon et Commentry, en 1845.
Etienne-Jean Bouchu apporta, comme plusieurs autres, sa forge et ses biens à cette nouvelle société des forges de Châtillon-Commentry.
Etienne-Jean Bouchu mourut, ruiné, à Arc-en-Barrois le 5 septembre 1773 et fut inhumé dans la chapelle Saint-Hubert de l'église d'Arc en Barrois..
Il eut deux fils, Victor et Thomas, qui furent proches de Gabriel Peignot.
Deux de ses fils furent maires d’Arc-en-Barrois : Thomas Bouchu de 1789 à 1791 et Victor Bouchu de 1791 à l’an IV et du 25 Germinal an VIII à l’an X.
Acte de naissance de René-Victor :
Il eut en tout huit enfants, certains morts en bas-âge.
Sa fille Catherine épousa Louis Thomassin de Montbel.
Son autre fille, Marie-Anne, épousa François Belgrand, maître de forges.
Thomas continua à être maître de forges
Un de ses fils, René-Victor, s'essaya à la poésie.
Au sujet d’Étienne Bouchu, Diderot écrivait à Grimm les lignes suivantes, lors de son séjour à Langres, en 1759 :
« Il y a ici un monsieur Bouchu, homme de tête que vous avez vu une fois ou deux chez le baron, gai, rebondi, rubicond. Habitant les forêts, creusant la terre, en tirant le fer, ramassant des plâtras, en remplissant ses poches, étudiant la nature tout seul, et passant pour fou comme Démocrite l’étant à peu près comme lui. Cet homme qui ne vous a pas oublié se recommande à votre souvenir. »
(Papiers personnels de Diderot, aux archives départementales de la Haute-Marne)
Après cette passionnante conférence, Dominique Masson répondit aux questions de l'assistance...
et présenta un cahier du Châtillonnais riche en documentation sur les forges en Côte d'Or et en Haute Marne.
Cahier disponible à l'Office du Tourisme de Châtillon sur Seine.
(Merci à Dominique Masson, pour ses corrections bienvenues)