Publié le 4 Octobre 2011
Annick Gueneau, Bibliothécaire de la Bibliothèque Municipale de Châtillon sur Seine , avait invité samedi 15 octobre 2011, dans le cadre de "Coups de Contes", Noëlle Renault , grande spécialiste des Nourrices Morvandelles.
En effet, de 1840 à 1920, les Morvandelles étaient des nourrices réputées dans les grandes familles nobles ou bourgeoises .
Depuis 1970, Noëlle Renault collecte sur ces femmes, des photographies et des anecdotes car leurs souvenirs sont restés vivaces en Morvan. Il en est de même pour les familles de l’aristocratie ou de la bourgeoisie qui les a employées.
Noëlle Renault, née en 1949 à Montsauche, est issue d’une famille qui a donné plusieurs nourrices. Elle a consigné ses recherches dans plusieurs ouvrages, que nous avons découverts le soir de la conférence. Notamment la vie de ces nourrices à travers leurs portraits et les diverses anecdotes collectées.
Noëlle Renault nous présente ici son arrière-grand mère qui fut une de ces nourrices morvandelles.
Après la naissance de leur propre enfant, certaines jeunes femmes quittaient le Morvan et venaient s'installer dans une famille d'accueil pour y allaiter un nourrisson, abandonnant pour souvent près de deux ans, enfants, mari, famille. En arrivant au "bureau de placement des nourrices" elles étaient examinées de près par un médecin , leur lait était goûté.. Elles étaient ensuite embauchées par des familles fortunées, nobles ou bourgeoises.
La nourrice était très considérée, elle ne devait rien faire, à part allaiter l'enfant. Pour que leur lait soit bon, elles étaient nourries plusieurs fois par jour avec des mets excellents, ce qui les faisait souvent grossir et ressembler à des "pots à tabac" !
Les nourrices étaient très joliment vêtues avec de beaux vêtements fournis par les familles qui les employaient. Elle portaient une coiffe caractéristique faite de rubans aux couleurs de la famille dont elles nourrissaient l'enfant..
Voici des rubans qui formaient la coiffe, ils descendaient aussi le long du dos.
La coiffe était attachée aux cheveux par des épingles caractéristiques...
Ce tableau a été peint par un membre d'une famille qui employait cette nourrice.
Voici quelques portraits de nourrices.
On remarque que , sur les photos, les nourrices n'ont pas souvent le sourire.. On peut les comprendre car elles étaient déracinées, ayant laissé leur bébé à leur belle-mère, bébé qui souvent mourait pendant leur séjour chez leurs employeurs (on le leur cachait d'ailleurs pour ne pas faire tourner leur lait !).
Néanmoins les "nounous" s'habituaient au luxe qui les entourait, et aux égards qu'on leur prodiguait...et quelquefois , au bout des deux ans, ce devait être bien difficile de rentrer au pays dans une chaumière à moitié délabrée et retrouver leur "galvacher" un peu...fruste..
(un "galvacher" morvandiau était un conducteur de boeufs d'attelage qui partait se louer, parfois loin du Morvan..certains sont même venus se louer en Châtillonnais nous dit Noëlle Renault)
Ce nourrisson était le fils d'une cantatrice, ce qui explique ses vêtements un peu...extravagants !
Certaines familles gardaient, après les deux ans habituels, leur nourrice en temps que "nourrices sèches".
Cette vieille nourrice sèche, fut chargée de surveiller les jeunes nourrices qui arrivaient dans la famille . Nourrices qui devaient allaiter les enfants de celles qu'elle avait elle-même nourries !
Les nounous suivaient leurs employeurs en vacances, comme ici à Houlgate...
Elles prenaient le deuil comme leurs maîtres ...
On voit bien ici les rubans des coiffes de ces nourrices devenues pour un temps parisiennes...
Les militaires aimaient, paraît-il, les nourrices, mais ce n'est peut-être qu'une légende...
Que pouvait elles bien penser ces jeunes femmes, lorsqu'elles rentraient au pays pour se retrouver dans ces masures morvandelles, alors qu'elles avaient connu le luxe des châteaux et des hôtels particuliers ? personne ne le sait...mais on peut peut-être l'imaginer...
En tout cas, elles rapportaient souvent pas mal d'argent qui leur permettait d'aménager ces chaumières au sol de terre battue, qu'on appelait ensuite "maisons de lait", ou bien pour acheter quelques lopins de terre .
Ces terres permettaient alors à leur mari de ne plus se louer comme galvacher.
Et puis les idées nouvelles de propreté, d'hygiène qu'elles ont rapportées, ont permis au Morvan d'évoluer, lentement et sûrement, et ce n'est pas si mal !
Un grand merci à Noëlle Renault pour cette conférence si instructive sur ces femmes méconnues , conférence qui a fort intéressé le public venu très nombreux, ce fut un grand succès, vraiment bien mérité !
PS : les photos que j'ai publiées appartiennent à madame Noëlle Renault, il est interdit de les utiliser sans son autorisation.
Un film sue les nourrices morvandelles :
https://www.arte.tv/fr/videos/117609-002-A/le-morvan-deuxieme-mere-de-la-capitale/